Les fonds de pension revoient leur allocation

Sans surprise, la crise financière impactera les politiques d'allocation d'actifs des fonds de pension. C'est le constat d'une étude réalisée par bfinance. Le cabinet de conseil en sélection de gérant a interrogé, entre le 17 et 23 octobre dernier, soit quelques jours après la débâcle des marchés financiers, 30 investisseurs institutionnels anglais, allemands, canadiens, suédois et suisses représentant des fonds de pension d'entreprises privées, publiques, des family offices, des fonds de dotation et des compagnies d'assurances. Ainsi, 63 % des sondés comptent revoir leur stratégie d'investissement, et 65 % déclarent qu'ils le feront d'ici à la fin de l'année 2008.En juin dernier, le Fonds de réserve des retraites (FRR) annonçait un changement d'orientation stratégique et une modification de ses allocations en faveur de la gestion indicielle. Ce mouvement confirme l'engouement des investisseurs pour des produits comme les ETFs (exchanged trade funds). Ce choix pour une gestion passive semble correspondre à une tendance. « Étonnamment, 41 % des fonds de pension interrogés vont diminuer la partie active de leur allocation au profit de la partie passive », constate Muriel Nahmias, directrice des études chez bfinance, qui note tout de même que 26 % vont l'augmenter, ce qui n'est pas négligeable compte tenu du contexte actuel. Mais avec l'effet marché négatif, l'exposition aux titres risqués, comme les actions, a mécaniquement diminué. On n'observe donc pas de courant vendeur de la part de ces investisseurs. D'ailleurs, les fonds de pension ne réagissent pas de manière instantanée. Un sondage effectué par Baring Asset Management en septembre auprès de 20 grands fonds de pension anglais montrait que l'allocation moyenne en actions avait chuté à 53,4 %, contre 63,9 % un an plus tôt. Pour bfinance, que ce soit sur un an ou trois ans, ils sont 37 % à vouloir réduire leur exposition aux actions. « Cela marque une tendance de la part des investisseurs de la recherche d'alpha et de stratégies décorrélantes », explique Muriel Nahmias.Mais cette redistribution stratégique n'intervient-elle pas trop tard alors que cette classe d'actifs a déjà fortement chuté ? C'est possible, même si personne ne sait quand s'arrêtera la correction des marchés. Cette défiance vis-à-vis des actions profite aux produits de taux, comme les emprunts d'État. Ils sont ainsi 30 %, dans les douze prochains mois, à augmenter cette classe d'actifs et 26 % d'ici trois ans. À l'inverse des actions, cela n'exprime pas une tendance de long terme, mais plutôt une augmentation conjoncturelle de l'aversion au risque.De même, on ne constate pas de volonté à court terme de diversifier davantage son portefeuille sur des classes d'actifs comme les hedge funds, les matières premières, l'investissement socialement responsable ou des produits à performance absolue. Sur trois ans, le constat est différent pour ces classes d'actifs. En effet, 54 % des fonds de pension vont diversifier leur allocation. Cela profitera aux classes d'actifs dites alternatives et supposées décorrélées des marchés comme les infrastructures, le private equity, l'immobilier ou encore les matières premières (voir graphique).Mais la crise financière actuelle n'a épargné aucune classe d'actifs puisque les produits non corrélés rencontrent aussi des limites. Le meilleur exemple étant l'immobilier. Cette redistribution au profit de gestion plus typée bénéficiera sans doute aux sociétés de gestion spécialisées, souvent de taille moyenne. Les investisseurs interrogés feront donc appel à d'autres maisons. Cela semble être le cas puisque l'étude révèle que 77 % des fonds de pension sondés envisagent de changer de gérant. C'est trois fois plus que la moyenne dans des conditions normales de marché.Cette situation profitera pleinement aux consultants. En effet, un tiers de ceux qui changeront de prestataires vont solliciter l'aide d'un cabinet pour sélectionner leurs futurs gérants. La baisse des marchés entraîne une baisse des encours et donc des revenus pour les sociétés de gestion. Cette baisse pourrait s'amplifier avec la perte de mandats en raison d'une offre non adaptée. À l'inverse, les structures qui proposent des produits alternatifs verront leurs revenus augmenter puisque ces supports sont fortement chargés.Dans une étude intitulée « Winning strategies in uncertain times », le Boston Consulting Group estime que, en 2012, 62 % de l'ensemble des commissions sera généré par ces produits alternatifs, innovants. D'où la structure des commissions sur ce type de véhicules. Au-delà des frais fixes, des commissions liées à la surperformance par rapport aux indices sont pratiquées. Avec la chute des marchés, le modèle traditionnel des frais fixes majorés de frais variables sur certains produits pourrait être remis en cause.Aujourd'hui, quelle que soit l'évolution de leur portefeuille, les investisseurs sont obligés de mettre la main à la poche. S'ils acceptent de payer des commissions quand la performance est au rendez-vous, il pourrait en être autrement dans le cas contraire.
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