Londres fait de la résistance

La colère était palpable hier lors d'une conférence en plein c?ur de la City, à Londres. Avec un bouc émissaire tout trouvé : Paris. « Je suis désolé de ne voir aucun officiel français dans la salle, parce que c'est à eux que s'adressent mes doléances », lance Paul Marshall, président du hedge fund Marshall Wace. Bob Wigley, auteur d'un récent rapport sur la compétitivité de la City, y voit une autre main coupable : « Le problème vient des Allemands. »Alors que la crise financière semble se calmer, les traditionnelles dissensions entre l'Europe continentale et la Grande-Bretagne reprennent. Le premier désaccord concerne le renforcement de la régulation européenne, suite aux propositions du rapport de Jacques de Larosière, l'ancien gouverneur de la Banque de France. S'il n'est pas question de mettre en place un régulateur unique, la Commission européenne souhaite créer un « conseil de supervision des risques financiers systémiques ». Le principe ne déplaît pas, mais Londres refuse catégoriquement que la Banque centrale européenne le préside.Un deuxième point de friction concerne la création du « Système européen des superviseurs financiers », un groupe qui coordonnerait les différents régulateurs financiers européens. Londres veut en limiter les pouvoirs : « Ce qui nous inquiète est qu'il puisse dire à un gouvernement : ?vous devez agir sur cette banque?, et que les contribuables du pays soient alors obligés de payer », expliquait la semaine dernière Alistair Darling, ministre de l'Économie britannique.protectionnismeUn autre désaccord concerne le projet de directive sur les fonds alternatifs (hedge funds, private equity?). « La proposition est apparue soudainement il y a un mois, alors que les hedge funds n'ont qu'une faible responsabilité dans la crise », souligne Richard Frase, avocat d'affaires à Dechert. Selon lui, la directive contient des mesures protectionnistes inacceptables pour la City, bloquant les fonds qui ne sont pas enregistrés en Europe.Mais la City s'inquiète aussi de l'action de son propre gouvernement. Hier soir, lors de son traditionnel discours annuel devant la City, Alistair Darling a prévenu : « La complexité et l'innovation financière ne doivent pas être des excuses pour le manque de transparence et l'absence de régulation. » Il présentera la semaine prochaine les grandes propositions de Downing Street, avec un livre blanc sur la régulation financière. Certains principes sont déjà acquis : renforcement « contra-cyclique » des fonds propres des banques, renforcement de la gouvernance d'entreprise (en particulier durcissement des critères pour devenir membre des conseils d'administration), et surtout un régulateur plus intrusif? La City, longtemps choyée par le gouvernement britannique, se sent désormais délaissée : « Les ministres ont réagi de façon populiste », regrette Bob Wigley.Éric Albert, à Londre
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