Les aberrations de la loi actuelle

C'est l'une des aberrations nées de la loi Chatel que Castorama dénonce. Le 10 novembre, l'enseigne de bricolage a été condamnée à verser 100.000 euros au syndicat Force ouvrière du Val-d'Oise pour ouverture illégale le dimanche dans ses magasins de Gonesse et Ezanville. Or, à quelques mètres de ces deux magasins Castorama ouverts depuis vingt ans tous les dimanches, Ikea et Conforama peuvent, eux, ouvrir ce jour-là sans craindre les foudres des syndicats ou de l'inspection du travail.« Pourquoi ? » s'indignent les enseignes de grande distribution. En fait, depuis la loi Chatel adoptée le 20 décembre 2007, tous les distributeurs de meubles peuvent ouvrir tous leurs magasins dans tout l'Hexagone. À l'époque, ils n'en demandaient pas tant. Jean-Louis Baillot, directeur général d'Ikea France, Christophe Cuvillier, PDG à l'époque de Conforama, et les dirigeants de Fly militaient auprès du gouvernement pour être autorisés à ouvrir leurs magasins dans la seule région d'Île-de-France. Mais ils ont décroché plus, à la faveur d'un amendement introduit in extremis par Isabelle Debré, députée UMP des Hauts-de-Seine.Le cadeau fait à Conforama et Ikea a du mal à passer. Castorama, qui dit réaliser « 60 % de son chiffre d'affaires sur des produits similaires à ceux de Conforama et Ikea », crie à la distorsion de concurrence. D'autant qu'il est aussi un distributeur de bacs à plantes et meubles de jardin, produits vendus dans les jardineries, elles aussi autorisées à ouverture dominicale urbi et orbi? Un micmac législatif dont Leroy Merlin est aussi victime. Attaqué par Force ouvrière pour ouverture illégale le dimanche et condamné à 40.000 euros d'astreinte sur ses magasins du Val-d'Oise, le leader du bricolage en France dénonce une remise en cause de la « libre et loyale concurrence ». Darty, leader de l'électroménager, est aussi vent debout contre une législation qui permet à Conforama d'ouvrir le dimanche. Or le numéro un français du meuble, filiale de PPR, réalise 17 % de son chiffre d'affaires avec l'électroménager et 21 % avec les produits électroniques. Une famille de produits que la Fnac, autre filiale de PPR, ne peut, elle, vendre le dimanche, faute d'autorisation.Il y aurait donc urgence à adopter une nouvelle loi. Sauf à prendre le risque de perdre des emplois ou de brider leur création, argumentent les distributeurs. Par exemple, 400 personnes travaillent dans les trois magasins Leroy Merlin du Val-d'Oise. Près de 200 dans ceux de Castorama à Gonesse et Ezanville, fermés désormais le dimanche.Le secteur du bricolage demande à pouvoir ouvrir tous les dimanches en Île-de-France, et non en province où, selon Castorama, il n'y a pas de demande de la part de la clientèle.Les enseignes de grands magasins aimeraient elles aussi voir la législation assouplie. Après avoir rallongé leurs horaires d'ouverture d'une heure l'été dernier, au grand dam de certains de leurs élus du personnel, les Galeries Lafayette et le Printemps aimeraient pouvoir ouvrir une « douzaine de dimanches par an ». Soit cinq de plus qu'actuellement. La proposition de Richard Mallié d'assouplir la législation dans les zones de forte affluence, dont Paris, trouve grâce à leurs yeux et à ceux des opérateurs touristiques. Les grands magasins et les hôteliers parisiens espèrent ainsi développer leur chiffre d'affaire. Faute de pouvoir faire du shopping le dimanche à Paris, Japonais, Russes et Chinois écourtent leur séjour parisien pour filer à Londres et faire les vitrines d'Oxford Street le dimanche.clarificationLa grande distribution alimentaire n'est pas moteur dans ce débat. La Fédération des entreprises de commerce et de distribution milite surtout pour une clarification de la législation. Question de rentabilité : les Carrefour, Auchan et autre Leclerc dont les marges sont étroites auraient du mal à rentabiliser l'ouverture de leurs hypermarchés un jour de plus dans la semaine. Juliette Garnier

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