« Le reproche de protectionnisme est inutile et injuste »

La commissaire européenne à la Concurrence, Neelie Kroes, a vivement critiqué mardi soir à Paris les « politiques protectionnistes » créant « des emplois grâce à l'argent des contribuables ». Comprenez-vous ses critiques ?Face à la crise, la priorité est d'apporter des réponses concrètes aux citoyens français et européens. Beaucoup d'États membres sont confrontés aux mêmes difficultés que les nôtres et veulent aussi sauver l'emploi dans leur pays. Ce n'est pas le moment de jeter la pierre à qui que ce soit. Les responsables politiques qui le font sont dans l'erreur. Mais pour la Commission, il est temps maintenant de travailler à la coordination de ces mesures.Ce type de polémique pèsera-t-il pour le renouvellement de la Commission, prévu cette année ?La question du renouvellement des fonctions des uns ou des autres n'est pas d'actualité. L'urgence est au règlement de la crise. En tant qu'élu local, je veux pouvoir dire aux citoyens que non seulement le gouvernement français agit avec efficacité, mais que l'Europe intervient aussi pour sauver l'industrie européenne, pour défendre l'emploi.La France a fait l'objet hier d'une mise en garde de Bruxelles pour son déficit public, et son plan d'aide au secteur automobile est jugé protectionniste : serions-nous devenus le mauvais élève de l'Union européenne ?Absolument pas ! La France inscrit toute son action dans le cadre de l'Union européenne et travaille main dans la main avec ses partenaires, en particulier la présidence tchèque. Aucun autre pays européen n'a fait autant que la France pour la coordination des politiques économiques européennes. Le reproche de protectionnisme est inutile et injuste.Concrètement, à quoi doit ressembler cette « coordination économique européenne » ?Nous avons déjà réussi à mettre cette idée à l'ordre du jour, alors qu'il y a encore quelques mois, elle était taboue. C'est un progrès. La tournée que nous venons d'effectuer avec Patrick Devedjian à Londres, Berlin, Prague et Rome va dans ce sens. La présidence tchèque de l'UE, pour sa part, travaille pour que le sommet européen extraordinaire consacré à la crise économique du 1er mars donne des résultats concrets. Le président de la République et la chancelière allemande ont déjà proposé à Prague des priorités pour cette réunion, en particulier la question du crédit. En plus de la lutte contre le protectionnisme sur laquelle nous sommes tous d'accord, il faudra avancer pour défendre l'emploi, définir une politique industrielle européenne et mettre en ?uvre une coordination plus étroite des actions de relance économique.Les responsables allemands ont été les plus virulents à critiquer le protectionnisme français. La concertation franco-allemande n'est-elle pas insuffisante ?Il y a un processus de rencontres régulières entre les responsables français et allemands qui a toujours existé et qui fonctionne bien. Je suis moi-même tous les quinze jours en Allemagne. Mais il faut renforcer cette concertation pour répondre à la crise économique et financière. Le Conseil des ministres franco-allemand du mois prochain pourrait être consacré à la relance économique afin de dégager des réponses communes, notamment pour le secteur automobile préoccupant beaucoup nos deux pays. On le voit en Allemagne avec la question du soutien au constructeur Opel. Nous voulons des constructeurs européens plus forts. En ce sens, le plan de soutien automobile en France est massif et efficace, il répond aux nécessités absolues de ce secteur. Mais la crise est radicalement nouvelle : nous avons besoin d'avancer unis pour préparer l'industrie automobile européenne de demain.La France est-elle favorable à une suspension des règles du Pacte de stabilité durant la crise ?Pourquoi suspendre les règles du Pacte de stabilité ? Elles autorisent déjà une certaine flexibilité. En outre, aucun État ne peut s'affranchir des règles décidées en commun. Il ne faut pas confondre le court terme ? l'urgence de défendre l'emploi et nos compétences industrielles ?, avec le long terme, c'est-à-dire la réduction de la dette publique, dès que la conjoncture économique le permettra.Propos recueillis parfrank Paul Weber, à Rome.Bruno Le Maire, secrétaire d'état chargé des affaires européennes
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