La Sicile chauffée à blanc

Il a beau être patient et calme par nature, Salvo Montalbano prend vite un coup de sang dans le dernier roman policier d'Andrea Camilleri, « Un été ardent ». Certes l'énigme qu'il doit résoudre ? le meurtre atroce d'une jeune fille ? est particulièrement complexe. Mais ce fin limier en a vu d'autres. Ce qui mine le commissaire de la petite ville de Vigata, c'est de devoir affronter la lâcheté et l'hypocrisie de ses supérieurs et, plus largement, d'un État qui baisse les bras devant la corruption, le crime et le racisme ordinaire d'une Sicile à la dérive. De fait, les lecteurs français qui se font une joie de se plonger chaque année dans la suite des savoureuses aventures de ce « Maigret sicilien » ont de quoi être désappointés. Car leur héros vieillit. Les dernières intrigues concoctées par Andrea Camilleri dévoilent un personnage plus sombre, plus angoissé par la mort. Déjà, dans « la Lune de papier » qui vient d'être réédité en poche chez Pocket, l'imperturbable Montalbano se retrouvait aux prises avec un crime sordide mettant à rude épreuve son intuition et ses certitudes.Pourtant, si ses héros sont fatigués, l'imagination du romancier sicilien semble sans borne. Après une longue carrière de metteur en scène pour le théâtre, la radio et la télévision, Camilleri s'est consacré sur le tard à la littérature en créant un style incomparable, mélange d'italien et de sicilien. Et ce n'est pas un hasard si ses livres caracolent en tête des meilleures ventes depuis dix ans en Italie.À 84 ans, il continue de publier ? en parallèle à sa série policière ? des romans historiques ayant pour cadre sa Sicile natale. Dans « la Couleur du soleil », récemment traduit chez Fayard, il n'hésite pas à se mettre en scène avec Le Caravage. Un mafioso admirateur du romancier lui fait l'honneur de le kidnapper pour lui présenter un précieux manuscrit relatant le dernier voyage du grand peintre fuyant la justice des chevaliers de Malte au XVIe siècle. Camilleri alterne les époques et les styles avec une aisance confondante. Une ?uvre étonnante.Laurent Pericone« Un été ardent », d'Andrea Camilleri. Traduit de l'italien par Serge Quadruppani. Fleuve noir, 224 pages, 19,90 euros.
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