Noël s'annonce morose pour les distributeurs

À deux mois de Noël, les groupes de distribution font grise mine. À commencer par les distributeurs américains, les derniers indicateurs économiques témoignant de l'entrée en récession des États-Unis. L'indice Standard and Poor's 500 de la distribution dévisse de près de 36 % depuis le début de l'année, une chute encore plus sévère que celle de la Bourse de New York, en repli de 32 %. L'inquiétude des investisseurs grandit à l'approche des fêtes de fin d'année, une période cruciale pour les distributeurs. Ces derniers réalisent en effet jusqu'à 35 % de leur chiffre d'affaires annuel durant les deux seuls mois de novembre et décembre.Or Noël 2008 risque d'être un très mauvais cru, en raison de la dégradation de l'économie américaine et de la crise financière. D'après une enquête réalisée par le bureau d'études NRF (National Retail Federation), le budget du consommateur américain pour Noël 2008 augmentera de 1,9 % seulement, à 832,36 dollars en moyenne. Il s'agira de sa plus faible hausse depuis 2002, année à partir de laquelle NRF avait commencé à établir des statistiques pour les ventes de Noël. Le fabricant de jouets américain Mattel s'attend même à une baisse des dépenses dans son secteur.Alertes sur résultats. Plusieurs distributeurs ont d'ores et déjà lancé des alertes sur leurs résultats. C'est le cas de JC Penney. Le troisième groupe américain de grands magasins a averti que son bénéfice net du troisième trimestre oscillerait entre 50 cents et 60 cents par action, au lieu d'un objectif initial compris entre 70 et 75 cents. Autre exemple, celui de son concurrent Nordstrom. Spécialisé dans le luxe, ce dernier ne table que sur un résultat par action de 32 à 37 cents pour le troisième trimestre. Le groupe espérait auparavant dégager jusqu'à 54 cents de bénéfice. Et la liste des sales ou profit warnings n'est pas finie. On y trouve les célèbres Saks et Macy's. Mais aussi Abercrombie & Fitch ou bien encore TJX.Déjà, en septembre, les ventes de détail aux États-Unis avaient fléchi de 1,2 %, a indiqué le département du Commerce le 15 octobre. C'est la plus forte baisse mensuelle depuis août 2005. Si le consommateur américain est en ce moment aussi près de ses sous, c'est parce que son moral est au plus bas. L'indice de confiance RBC Cash est tombé à 37 points en octobre, contre 69,2 points en septembre. Comment pourrait-il en être autrement ? L'essence qui se vend à prix d'or, la cherté des produits alimentaires, l'effondrement de l'immobilier, la montée du chômage, la crise du marché du crédit... Tous les ingrédients sont réunis pour inciter les ménages américains à jouer les fourmis plutôt que les cigales. Plus question de dépenses futiles, le consommateur se limite à l'indispensable. Et pour les biens dont ils ne peuvent se passer, comme les produits alimentaires, les ménages recherchent les prix les plus bas.Le hard discount épargné.Pourtant, cette situation fait au moins un distributeur américain heureux : Wal-Mart. Spécialisé dans le hard discount, le groupe, qui voit son cours de Bourse grimper de 15 % depuis janvier, a récemment confirmé ses objectifs de résultats : il dégagera un bénéfice net par action compris entre 73 et 76 cents, au troisième trimestre.En Europe, les hard discounters allemands Aldi et Lidl - qui ne sont pas cotés en Bourse - remportent le même succès depuis plusieurs mois. Au détriment des enseignes traditionnelles, comme le français Carrefour. Si bien que l'indice Bloomberg de la distribution alimentaire européenne décroche de 38 % depuis janvier. Pis, l'indice Bloomberg de la distribution globale européenne, qui comprend également les distributeurs de vêtements, de matériel de bricolage, de hi-fi, s'affaisse de 50 %.Fusions-acquisitions en vue.Les investisseurs ne sont pas les seuls à se faire des cheveux blancs au sujet des perspectives d'activité et de résultats de Kingfisher, Kesa Electricals, et autres Inditex (propriétaire de la marque Zara) et H&M. Moody's vient d'abaisser de " stable " à " négative " la perspective sur les notes de solvabilité des distributeurs européens. À moins d'un rebond de la consommation, l'agence d'évaluation financière n'exclut pas une dégradation de la note du secteur, au cours des douze ou dix-huit prochains mois.Moody's souligne toutefois que les distributeurs ont jusqu'à présent oeuvré dans le bon sens pour préserver leurs bilans. Au prix de réductions de dividendes et de programmes de rachats d'actions suspendus. Toutes choses qui ne sont pas faites pour ravir les actionnaires. Revers positif de la médaille, des fusions et acquisitions pourraient avoir lieu si les distributeurs s'ingénient à maintenir un bon matelas de liquidités, indique Moody's. Ce qui conférerait un attrait spéculatif au secteur.(*) Journaliste au service Marchés & Finances à La Tribune.
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