Après avoir soulevé le voile de mystère entourant la tapisserie de Bayeux dans « Intrigue à l'anglaise », Adrien Goetz (Prix des Deux Magots et Prix Roger-Nimier en 2004 pour « la Dormeuse de Naples ») nous convie aujourd'hui à passer de l'autre coté des miroirs de la Galerie des glaces, loin du parcours balisé des flots de touristes. L'occasion pour les personnages hauts en couleur de son précédent roman de vivre de nouvelles aventures historiques dans le cadre prestigieux mais légèrement mité du château de Versailles.un meuble inconnuRécemment nommée conservatrice en charge des tissus, Pénélope Breuil fait découvrir son nouveau domaine à son fiancé, le snob et désabusé Wandrille, quand une étrange affaire les rattrape. Un meuble inconnu ? une superbe « table à écrire » ? fait son apparition dans les appartements privés de Marie-Antoinette, tandis que le cadavre d'une ressortissante chinoise est découvert dans un bassin du parc. De quoi perturber le train-train du personnel du château. Et plus encore lorsque l'index du macchabée est retrouvé dans un tiroir de la table?Plus que l'intrigue virevoltante et les dialogues servis à la mitraillette, c'est l'érudition communicative et le gai savoir de l'auteur ? historien de l'art par ailleurs et rédacteur en chef de « Grande Galerie », le journal du Louvre ? qui séduisent dans ce roman. Adrien Goetz connaît chaque recoin du bâtiment et nous régale d'anecdotes plus ou moins lestes. Il réveille au passage nos lointains souvenirs de cours d'histoire sur le jansénisme et les fidèles de Port-Royal. Un mouvement spirituel sévèrement réprimé par Louis XIV mais dont l'esprit plane encore sur les lieux.La galerie des personnages qui peuple ce palais donne le tournis : Adrien Goetz décrit avec verve et humour les conflits d'intérêts entre les conservateurs du château et les architectes des Monuments de France ou les rivalités entre gardiens? affrontements potagersMême le potager du roi devient un terrain miné où les bandes de paysagistes formés à l'école Le Nôtre manquent de s'affronter avec les jardiniers adeptes de monsieur de La Quintinie.Plus sérieusement, le romancier rappelle au passage quelques vérités bonnes à méditer. Notamment sur la place dans notre patrimoine national de cet étonnant vaisseau de pierre qui ? tel un mille-feuille géant ? a subi l'influence des différentes époques qu'il a traversées. Un des conservateurs s'interroge à juste titre sur cette étrange volonté de figer ce monument à l'époque de Louis XIV et de Louis XVI, alors qu'il a été remanié sous Louis-Philippe et que le mobilier a été éparpillé un peu partout en Europe. Des siècles après sa mort, le Roi-Soleil étend encore son ombre tutélaire sur son château ! n« Intrigue à Versailles », d'Adrien Goetz. Grasset, 410 pages, 18 euros.

latribune.fr

07 Mai 2009, 1:42

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