Nicolas Sarkozy va chercher à Pékin des alliés pour refonder le capitalisme

La crise financière et ses conséquences s'imposeront tout naturellement au menu du sommet Europe Asie (Asem) qui réunira demain et après-demain à Pékin les hauts dirigeants de quarante-trois États. Ce forum, plutôt connu pour son caractère formel, a pour sa septième édition un dossier substantiel à son ordre du jour : la refonte de la gouvernance financière mondiale que Nicolas Sarkozy appelle de ses voeux. Fort du feu vert que George Bush lui a délivré à Camp David la semaine dernière pour lancer la réflexion sur ce thème, le président français veut profiter de la tribune que lui offrira l'Asem, où il se rendra dès aujourd'hui, pour rallier à sa cause quelques-uns des plus importants pays émergents.De ses bagages, Nicolas Sarkozy sortira sa proposition d'un sommet du G8 élargi sur le thème de la " refondation du capitalisme financier " , avec un premier rendez-vous qui vient d'être fixé au 15 novembre à Washington. Le président français souhaite y convier les cinq principaux pays du Sud (Chine, Inde, Brésil, Mexique, Afrique du Sud), voire opter pour le format du G20, rassemblant pays riches et émergents. Des alliés de poids. À eux seuls, les grands pays asiatiques recèlent près de 4.000 milliards de dollars de réserves de changes, dont la moitié est entre les mains de la Chine.Le fait que la crise financière soit née aux États-Unis donne cette année une dimension particulière à l'Asem. Cette enceinte a été fondée en 1996 pour rééquilibrer l'influence américaine dans la région Asie-Pacifique. La crise, qui commence à mordre sur la croissance des pays en développement, suscite des inquiétudes auprès des dirigeants asiatiques dont la légitimité politique repose sur leur capacité à éradiquer la pauvreté. " L'Inde a déjà fait savoir à Paris qu'elle est d'accord pour participer au G8 élargi souhaité par Nicolas Sarkozy ", assurait-on hier à l'Élysée.UN SIGNE ENCOURAGEANTQuant à Pékin, " il n'y a pas encore de oui formel ", ajoute-t-on. Le fait que la Banque Populaire de Chine abaisse ses taux d'intérêt au même moment que les autres principales banques centrales, le 10 octobre, a été relevé comme un signe encourageant. Mais Pékin est-il prêt à " remettre à plat les règles du financement international ", comme le souhaite l'Élysée ? Le régime chinois, qui a bâti son modèle d'exportations comme l'une des clés de sa croissance, peut-il souhaiter remettre en cause un équilibre financier international qui lui a jusqu'à présent si bien réussi ?Lorsqu'il s'est entretenu de la crise avec le numéro un chinois, Hu Jintao, par téléphone mardi, George Bush n'a sans doute pas manqué de lui faire part de ses réserves sur la question de la refonte du capitalisme. Pékin a d'ailleurs des raisons de ne pas dramatiser les conséquences de la crise. " En secourant Fannie Mae, Freddie Mac et le système bancaire, les autorités américaines ont garanti les réserves chinoises investies en titres libellés en dollars ", observe François Godement, président de Asia Centre. Mieux, la forte remontée du dollar revalorise ces réserves. Quant aux effets de la crise, " ils accélèrent le rééquilibrage que Pékin recherche vers une demande intérieure plus forte et atténuent la pression à la hausse qui s'exerce sur le yuan ", analyse François Godement.TROUVER DES ARGUMENTSLors de l'Asem, Nicolas Sarkozy aura donc fort à faire pour convaincre ses interlocuteurs. D'autant que, pour l'heure, " en dehors de mesures importantes mais très ciblées portant sur les agences de notation, les paradis fiscaux ou encore les règles prudentielles en matière bancaire et financière, il n'y a pas de réelles propositions sur la table " pour donner un contenu à son idée de refonte du capitalisme, estime Jérôme Sgard, chercheur au Ceri. " Pour l'instant il n'est pas question de mettre en oeuvre une supervision internationale des banques, ou une régulation internationale des marchés ou encore un gouvernement économique en Europe c'est-à-dire des changements qui mettraient en cause la souveraineté nationale ", constate l'économiste.En Asie, des réponses nationales à la criseL'Asie n'est pas un exemple de réponse concertée à la crise. Les appels de Séoul pour accélérer la création d'un fonds monétaire asiatique, capable d'apporter des devises aux pays vulnérables de la zone, peine à aboutir. Jusqu'à présent, les mesures prises sont nationales. La Corée libère des sources de capitaux frais pour ses banques et concocte un plan de relance. Mêmes remèdes au Japon. De son côté, la Chine surfe sur la vague, en relançant la consommation pour pallier le ralentissement des exportations. Objectif qu'elle poursuivait déjà avant la crise.
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