Un combat de coqs entre Washington et Pékin

 Il n'y a pas grand monde qui regrette George Bush ? à part les Chinois, bien sûr ! », s'exclame Charles Freeman, spécialiste des relations sino-américaines au Center for Strategic and International Studies, à Washington. De fait, « Pékin s'entend mieux avec les administrations républicaines, par tradition », explique cet expert. Mais surtout, l'ancien président américain a fait beaucoup d'efforts ? avec pas moins de quatre visites officielles, un record, pour s'assurer du concours de la Chine dans la lutte contre le terrorisme après les attentats du 11 septembre 2001. Enfin, si Henry Paulson, secrétaire au Trésor de l'ancienne administration Bush, avait fait pression pour une réévaluation du yuan, dont la faiblesse renforce la compétitivité des exportations chinoises, il s'est bien gardé de parler de « manipulation ».Changement de décor avec l'administration Obama. Interrogé jeudi dernier sur la Chine par les sénateurs, Timothy Geithner, futur secrétaire au Trésor, a rapporté que Barack Obama estime que ce pays « manipule » le cours de sa devise afin de soutenir ses exportations et a promis une diplomatie « intensive » auprès de Pékin pour obtenir un relèvement de la parité du yuan par rapport au dollar. L'accusation de manipulation du yuan a fait l'effet d'une douche froide à Pékin. « Le gouvernement chinois n'a jamais eu recours à une supposée manipulation de devise pour engranger des bénéfices pour son commerce extérieur », a rétorqué, ce week-end, le ministère du Commerce chinois.réflexe protectionnisteNon seulement les démocrates sont, par tradition, plus enclins à défendre les droits de l'Homme tout en étant plus protectionnistes, mais en plus, la crise économique renforce les présomptions américaines. L'an dernier déjà, le sénateur Obama avait soutenu une proposition de loi estimant qu'en cas de « manipulation » d'une monnaie, des hausses de droits de douane pouvaient être envisagées en compensation ? sans succès. Le candidat Obama avait mis en avant sa volonté de sauver les emplois américains. Et le président Obama va peut-être maintenant mettre son plan à exécution grâce au soutien des parlementaires démocrates, majoritaires au Congrès et particulièrement inquiets du chômage dans leur circonscription. Ironie de la situation, de l'autre côté du Pacifique, c'est la même volonté de sauver des emplois qui pourrait inciter les autorités communistes à faire exactement l'inverse de ce que souhaite Washington.le statu quo de la chineLa balance commerciale entre les deux superpuissances a beau être largement en faveur de la Chine (le déficit sur l'année 2008 devrait atteindre 260 à 265 milliards de dollars, contre 256 en 2007), les autorités chinoises ont tout intérêt, pour préserver les emplois, à ce que le déséquilibre persiste. Dans ces conditions, pas question de réévaluer le yuan. En outre, « Pékin s'inquiète sérieusement des sorties de capitaux étrangers », relève Derek Scissors, spécialiste de la Chine à l'Heritage Foundation, un institut de recherche à Washington. Pour séduire les investisseurs, mieux vaut donc maintenir pour le moment la valeur de la monnaie nationale?Les acteurs sur les marchés auraient en tout cas déjà décidé du vainqueur. Ils commenceraient depuis quelques jours à acheter du yuan ? en pariant qu'il sera réévalué? n
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