Déserts médicaux  : jusqu'où ira Sarkozy  ?

L'Élysée est-il prêt à se mettre les médecins à dos pour stopper les déserts médicaux ? Dès le début de son mandat, Nicolas Sarkozy a pointé la nécessité de mieux répartir les professionnels de santé sur le territoire. Le voilà désormais au pied du mur : après plusieurs mois de négociations, l'assurance-maladie et les syndicats de médecins doivent s'accorder sur des mesures concrètes avant l'adoption de la loi « Hôpital, Patients, Santé, Territoires » (HPST), dont l'examen par l'Assemblée débute le 10 février. Or le consensus semble introuvable. L'assurance-maladie ? pressée par le ministère de la Santé ? veut imposer aux médecins d'exercer, au moins ponctuellement, dans les zones sous-dotées. En contrepartie, la consultation des généralistes serait revalorisée de 22 à 23 euros. Dernière idée en date : imposer une taxe d'environ 1.000 euros annuels aux généralistes installés en zone surdotée et refusant de participer à des missions de service public, notamment en prêtant main-forte dans les territoires délaissés. Une taxe inacceptable pour le premier syndicat de médecins libéraux, la CSMF. « Nous sommes revenus à la case 1995, lorsque Alain Juppé a voulu imposer la maîtrise comptable aux médecins, prévient son président Michel Chassang. À l'époque, tous les médecins ont dû payer 9.000 francs parce que les dépenses de santé avaient progressé trop vite. Aux élections de 1997, la droite a été battue à plate couture et les médecins y ont contribué. » Le souvenir est cuisant, mais, fait-on valoir au gouvernement, le cadre a changé. « La grande différence par rapport à 1995, c'est que les déserts médicaux sont apparus dans de nombreuses régions. La pression vient de la population et des élus locaux, notamment de droite, note un conseiller au sein du gouvernement. Il faut trouver un compromis avec les grands syndicats, privilégier la négociation car il ne sera pas facile d'imposer par la loi HPST une répartition de l'activité médicale. » Toutefois, les syndicats de médecins ne sont pas unanimes. Si la CSMF bloque, MG France, leader chez les médecins généralistes, juge la taxe « inévitable ». « Nous devons assumer nos responsabilités, organiser un accès aux soins pour tous les patients. Mais peut-on imposer une régulation à un corps social qui s'est toujours considéré comme hors du droit commun ? » s'interroge Martial Olivier-Koehret, président de MG France. Le gouvernement sait également que, en période de crise, il ne pourra pas, politiquement, accorder une hausse de tarifs aux médecins (250 millions d'euros par an), sans efforts conséquents des praticiens.un ballon d'essaiLe contexte plaide donc pour la fermeté. Cela étant, le gouvernement a reculé rapidement lorsque, en 2007, les internes ont protesté contre la remise en cause de la liberté d'installation. Tout dépendra donc de la mobilisation des professionnels de santé. Reste que, pour de nombreux experts, cette taxe est une « mesure politique », « pas très efficace ». Pour le député UMP Yves Bur, dubitatif, la taxe « est peut-être un ballon d'essai. On peut envisager d'autres mesures contraignantes, comme l'obligation pour les étudiants d'exercer en fin de cursus dans les territoires sous-dotés ou valoriser davantage les honoraires des médecins qui ont exercé en zones sous-dotées, éventuellement en leur permettant des dépassements ». Véronique Chocro
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