La réforme de la supervision, c'est « maintenant ou jamais »

charlie mccreevy, Commissaire européen en charge du marché intérieur et des servicesCe sera maintenant ou jamais. Si nous ne pouvons pas réformer le secteur financier, la supervision financière quand nous traversons une crise, quand le pourrons-nous ? » s'est interrogé hier le président de la Commission européenne, qui présentait un projet de réforme sans précédent de la supervision financière en Europe. José Manuel Barroso souhaite faire endosser son projet aux chefs d'État et de gouvernement à la fin du mois lors du prochain sommet européen.Un sommet où il espère, en outre, être reconduit à la tête de l'exécutif européen. Sa réforme est directement inspirée des propositions du groupe présidé par l'ancien directeur du Fonds monétaire international Jacques de Larosière, si ce n'est que la Commission en a accéléré le calendrier. Un Conseil européen du risque systémique devrait voir le jour, présidé par le président de la Banque centrale européenne. Une perspective qui n'est pas du goût des Britanniques, qui auraient préféré une présidence neutre ou tournante. Les observateurs français estiment en général que ces propositions sont le minimum acceptable compte tenu des défaillances de l'organisation actuelle. Le commissaire en charge des services financiers, Charlie McCreevy, dont les services ont planché sur le sujet, se veut plus prudent. La Commission européenne prend l'initiative sur la supervision après des années de tergiversation. Pourquoi maintenant ?La crise a créé une occasion. Elle a mis en exergue la question de la supervision dans chaque État membre et au niveau de l'Union européenne. C'est l'occasion de créer une architecture moderne et appropriée pour la surveillance en Europe. Ce qui est une évidence depuis longtemps et qui avait amené la Commission à demander à Jacques de Larosière de présider un groupe d'experts. Ce groupe a été un catalysateur. Mais je suis réaliste. J'ai suivi ce débat à un titre ou à un autre depuis 1997. Je m'attends donc à ce que, lorsque l'on entrera dans les détails, il y ait beaucoup de discussions. Cela a toujours été le cas dans le passé. Récemment encore, la directive Solvabilité 2 a montré que les questions de supervisions étaient très difficiles à traiter. Quelles sont les chances de la Commission de réussir ?Le président [de la Commission] Barroso a dit qu'il espérait que les chefs d'État et de gouvernement s'approprieraient le projet. Je l'espère aussi. Mon expérience cependant est que les dirigeants politiques peuvent dire « ok, très bien, faisons-le » mais ensuite, quand vous mettez la proposition sur la table, les choses changent parfois. Des groupes d'intérêts, des experts, les superviseurs eux-mêmes s'impliquent et les difficultés apparaissent. Des propositions raisonnables peuvent ainsi être délayées ou revues à la baisse. Comme le président Barroso, je dirais donc : appropriez-vous le projet, laissez vous porter par le vent favorable qui souffle pour l'instant pour bâtir une meilleure architecture de la supervision. La Commission a apparemment surmonté les réticences des pays, notamment d'Europe centrale, qui redoutent de perdre le contrôle de leur industrie financière avec une supervision plus intégrée?Pour l'instant, vous avez raison. Notre proposition jouit d'un soutien général. Mais je fais de la politique depuis trop longtemps pour présumer du résultat. En outre, ce n'est pas un sujet qui oppose les grands États membres aux petits, ou les États membres de la zone euro à ceux qui ne le sont pas. Chaque pays a ses difficultés. Je pense toutefois qu'il y a un grand réalisme chez tout le monde. Pour le dire autrement : si on n'y arrive pas maintenant, avec l'occasion créée par la crise, on n'y arrivera jamais.En quoi la création d'un superviseur européen est-elle impossible à ce stade ?Jacques de Larosière a fait une proposition qui ne nécessite pas de changer le traité [ce qu'aurait exigé la création d'un superviseur européen]. Il a été très pragmatique et il a eu raison. Il aurait été très difficile de modifier le traité. Si toutefois cela était possible, encore faudrait-il ensuite faire adopter une législation subséquente. Je doute fort qu'il me soit donné de le voir de mon vivant. Propos recueillis par Yann-Antony Noghès, à Bruxelle
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