La taxe carbone, ou la nouvelle usine à gaz

Les réflexions autour de la création d'une taxe carbone, ou contribution climat énergie (CCE), ressemblent de plus en plus à un casse-tête. Car la mise en ?uvre d'une nouvelle fiscalité écologique dès 2010, ainsi que l'a promis le Premier ministre, François Fillon, soulève de multiples difficultés.Parmi celles-ci, la fixation du prix de la tonne de carbone figure en bonne place. Selon les experts, unanimes, le signal-prix que constitue le prix de la tonne de carbone ne peut être efficace qu'à partir d'un seuil minimal qui se situe selon eux autour d'une trentaine d'euros. D'où la proposition de la commission Rocard de fixer ce prix à 32 euros. Mais celui-ci a des conséquences immédiates, notamment sur le coût des carburants à la pompe. À 32 euros, les experts ont calculé un renchérissement du litre d'essence de 7 à 8 centimes. Politiquement très difficile à assumer, en ces temps de crise économique et de bataille pour la préservation du pouvoir d'achat, auprès des automobilistes comme auprès de toutes les professions dont l'activité est directement liée au coût des carburants (routiers, pêcheurs, ambulanciers?). C'est sans doute pour cette raison que la ministre de l'Économie, Christine Lagarde, comme la secrétaire d'État à l'Écologie, Chantal Jouanno, ont évoqué un prix tournant autour de 15 euros. Une manière de préserver la paix sociale, quitte à rendre l'impôt bien moins efficace sur le plan environnemental.polémiquesSeconde difficulté, qui fait également l'objet de polémiques au sein du gouvernement, la question de la redistribution. Initialement, selon le compromis sorti du Grenelle de l'environnement, les recettes de la taxe devaient être intégralement reversées sous forme de chèques verts. Une formule que défend le ministre du Développement durable, Jean-Louis Borloo, car elle garantit, selon lui, la vocation incitative du nouvel impôt. Les ménages et les entreprises qui font des efforts d'économies d'énergie sont financièrement bénéficiaires. Les autres payent leur consommation excessive.Mais cette redistribution intégrale est désormais remise en cause. Notamment par Bercy, qui voit dans la nouvelle taxe une opportunité pour résoudre d'autres problèmes, comme celui de la compensation des pertes fiscales liées à la suppression de la taxe professionnelle. Autre exemple, le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez, s'est clairement déclaré opposé au chèque vert, estimant que « la recette de la taxe carbone doit être traitée comme n'importe quelle recette du budget de l'État ».Une troisième difficulté réside dans la manière dont il est question de résoudre certaines inéquités créées par la taxe : comment compenser le fait qu'elle frappera bien plus un ménage habitant un pavillon en banlieue qu'un célibataire occupant un appartement en ville ? Certes, des critères comme la prise en compte du quotient familial pourraient venir corriger en partie ces distorsions fiscales. Sauf qu'à vouloir tout corriger, on risque au final de créer une véritable usine? à gaz.
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