Les publicitaires veulent se réinventer

Ce n'est pas une récession, c'est un moment de ?reset? » : Steve Ballmer, le président de Microsoft, qui s'adressait aux 6.000 professionnels de 90 pays réunis la semaine dernière à Cannes, lors du 56e Festival international de la publicité a donné le ton. Le secteur n'est certes pas au meilleur de sa forme, mais il ne se laisse pas abattre. Et tous espèrent, comme l'affirmait également devant les festivaliers, Eric Schmidt, le président de Google, que « nous avons passé le plus gros ».L'événement qui réunit chaque année créatifs et patrons d'agences avait pourtant commencé sous les nuages, avec un nombre de travaux en compétition en baisse de 20 %. À l'exception du design et de la promotion, qui enregistrent des participations en hausse de 1,2 % et 1,5 %, et de l'arrivée d'une nouvelle discipline, les relations publiques, toutes les catégories chutent, particulièrement dans les médias traditionnels (presse : ? 32,2 % ; films : ? 25,4 % ; affichage : ? 23 %). Les Français ont été encore plus sévères : 33 % d'inscriptions en moins. Le nombre de festivaliers a également suivi cette pente avec une baisse de 40 %. Quant aux grandes fêtes traditionnelles ou opérations de relations publiques sur la Croisette, elles ont été réduites à leur strict minimum. En lieu et place, les participants ont pu assister aux nombreuses conférences données par des dirigeants de grands groupes : Microsoft, Google, mais aussi Coca-Cola, Nike, Procter & Gamble, Kraft? La prise de conscience plus forte des enjeux sociétaux et environnementaux s'est aussi manifestée autour de l'association ACT Responsible, dont la mission est de fédérer, promouvoir et inspirer les bonnes pratiques dans la publicité en faveur de la responsabilité sociale et du développement durable. Kofi Annan, l'ancien secrétaire général de l'ONU et aujourd'hui président du Global Humanitarian Forum, a choisi le Festival pour annoncer jeudi dernier le lancement de son projet « TcK », un compte à rebours jusqu'au 7 décembre, début de la conférence internationale sur le climat de Copenhague.un réveil « bienvenu »Une publicité nouvelle serait-elle donc réellement en train de naître, plus engagée, plus proche des consommateurs et des citoyens ? Ou s'agit-il là d'une énième méthode Coué pour nous faire croire que tout va pour le mieux ? Maurice Lévy, le président de Publicis, le reconnaît : « Bien sûr, la crise est là, mais les crises ont quelque chose de stimulant, elles nous amènent à penser autrement, à défricher des nouveaux territoires. Elles séparent ceux qui sont capables de rebondir des autres. La publicité fait face à d'importants défis, qui vont transformer la consommation et les médias. Elle devra changer profondément le langage des approches émotionnelles, de séduction et de désir qui sont indispensables à son fonctionnement. Nous serons donc amenés à être plus convaincants, à nous adresser de plus en plus personnellement à nos cibles et à développer d'autres disciplines. Il existait un décalage entre les attentes et les façons dont les patrons d'agence voyaient la communication. Ce réveil est le bienvenu. »Raphaël de Andreis, coprésident de BETC Euro RSCG, le constate : « Tant que les affaires allaient bien, il y avait une dérive possible de notre métier, la publicité risquait de devenir une sorte de décorum et le festival un exercice loin de la réalité, un peu comme un musée. Avec la crise, on assiste à deux lames de fond qui se bousculent, la première pousse plus que jamais la publicité dans le chemin de l'efficacité et la deuxième oblige à réinventer tous les chemins qui peuvent y aider. » Preuve en est la pluie de grands prix accordés (Relations publiques, Cyber et Direct) à la campagne pour l'office de tourisme du Queensland, « le meilleur job du monde ». L'opération, qui a commencé par une petite annonce dans la presse, s'est transformée en une campagne de relations publiques et de recrutement en ligne et a généré 35.000 candidatures. L'idée, souligne Raphaël de Andreis « tient sur un ticket de métro mais a touché absolument tous les métiers ». « changer l'histoire »Autre preuve de ces nouveaux courants, l'attribution des deux grands prix Titanium (pour une campagne innovante) et Campagnes intégrées à la stratégie électorale de Barack Obama, dont le directeur de campagne, David Piouffe, était d'ailleurs présent à Cannes. Une communication qui « a changé l'histoire », insiste David Droga, président du jury. Tout aussi significative est l'attribution du grand prix Films à une campagne Internet ? une première à Cannes ? à la vidéo néerlandaise « Carousel » pour Philips Cinema 21:9. « Le numérique est à juste titre de plus en plus au c?ur des préoccupations des annonceurs, nous sommes à un moment de bascule, on ne reviendra plus en arrière », se réjouit Matthieu de Lesseux, président de Duke.
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