Nicolas Sarkozy a le dernier mot ? Mardi 30 septembre

La réunion commence vers minuit. Le directeur général de la Caisse des dépôts a son projet bien ficelé. Il propose que l'État français et la Caisse investissent conjointement 3 milliards d'euros, autant pour les Belges, et le solde pour l'État luxembourgeois. Les grandes lignes de l'accord final sont tracées. Sur le principe, le gouvernement belge est d'accord. Mais, vers 1 heure du matin, les actionnaires historiques belges (Ethias, Arcofin et les communes) renâclent et souhaitent de nouvelles discussions sur des scénarios alternatifs. Malgré leurs faibles moyens financiers, ils veulent s'assurer d'une participation suffisante dans Dexia pour jouir des dividendes, sources financières importantes pour eux. Ils posent tout d'abord la question du rehausseur de crédit FSA, alors que les États s'étaient mis d'accord pour traiter ce problème après l'augmentation de capital. Face au refus des gouvernements, les actionnaires belges proposent alors une recapitalisation au niveau des filiales nationales, selon le schéma adopté la veille par les gouvernements néerlandais et belge pour sauver le groupe Fortis. Les Belges reprendraient alors l'ancien Crédit Communal et les Français le périmètre de l'ex-Crédit Local de France. Bref, un schéma qui revient à scinder Dexia en deux, soit un bond de douze ans en arrière, avant la fusion des deux banques. L'option présente l'avantage de redonner aux Belges leur activité de banque de détail. Mais les Français et le gouvernement belge ne veulent à aucun prix démanteler Dexia. D'autant que les Français, dans cette hypothèse, hériteraient non seulement de l'activité de financement des collectivités locales, de loin la plus fragilisée avec le tarissement des sources de refinancement, mais aussi de la filiale américaine FSA, à l'origine de la crise du groupe. La réponse d'Augustin de Romanet, chef du camp français, n'est pas négociable : c'est non ! Mais les actionnaires belges ne lâchent pas prise et exigent des garanties sur la ligne de crédit de 5 milliards d'euros que Dexia a accordée à sa filiale quelques semaines auparavant. Après un débat houleux, les négociations sont, vers 3 heures du matin, directement menées par le Premier ministre belge, Yves Leterme, et son ministre des Finances, Didier Reynders, et la ministre de l'Économie, Christine Lagarde. Parallèlement, un conseil d'administration de crise de FSA est convoqué, par téléphone, pour régler le problème de sa ligne de crédit. Au petit matin, la France et la Belgique tombent d'accord sur le plan de recapitalisation. Reste à valider l'accord auprès de Nicolas Sarkozy et de François Fillon, réunis ensemble à l'Élysée. contrainte de tailleSur le principe, le président de la République donne son feu vert. Mais une contrainte de taille s'ajoute au dernier moment. La recapitalisation devait se faire à un prix de marché légèrement décoté et donner environ 28 % du capital à l'État français, via un placement réservé aux États. Mais la réglementation boursière impose que le prix de souscription des nouveaux titres soit équivalent à la moyenne des cours des trente derniers jours. Le prix se trouve donc revu à la hausse pour atteindre 9,90 euros. Du coup, l'État et la Caisse des dépôts ne se retrouvent plus qu'à hauteur de 25 % du capital, le minimum requis pour la minorité de blocage. Nicolas Sarkozy fait connaître son mécontentement et profite de sa position de force pour pousser Yves Leterme à accepter le limogeage des dirigeants de Dexia. À 7 h 30 du matin, l'accord définitif est scellé. Le cours de Bourse est suspendu pendant que le conseil d'administration se réunit pour valider le sauvetage et l'annoncer dans la foulée.
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