Qu'as-tu à regarder la paille qui est dans l' ? il de ton frèr...

Qu'as-tu à regarder la paille qui est dans l'?il de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton ?il à toi, ne la vois-tu pas ? ». Une version financière de cette parabole a été exposée par l'économiste André Orléan (1). En 2005, Alan Greenspan affirmait, contre l'évidence, qu'il n'y avait pas de bulle immobilière. Il admettait l'existence de dérives sur des marchés locaux, de la « mousse » (« froth »), mais il soutenait que ces anomalies ne communiquaient pas entre elles et qu'aucune bulle globale ne se formait. Orléan rappelle ces mots du grand économiste Irving Fisher quelques jours avant le krach de 1929 : « Les cours des actions ont atteint ce qui semble devoir être un haut niveau permanent. »Pour Orléan, l'aveuglement des experts avant la crise ne tient pas à l'opacité des instruments financiers, mais à la conjonction d'un « trait spécifique du monde économique, son incertitude radicale » et de traits permanents de la psychologie collective. Comme le soulignait Keynes, l'incertitude est consubstantielle au monde économique et financier. C'est l'incertitude qui crée les anticipations et donc le marché. Aucun calcul de probabilités jamais ne permettra de prévoir l'avenir. Supprimez l'incertitude, vous supprimez le marché. À quoi s'ajoutent deux traits de la psychologie collective. D'abord, la tendance des acteurs à justifier l'optimisme de leurs anticipations par leur intérêt concret, celui de voir l'euphorie du marché se poursuivre. Ensuite, et surtout, la « pression morale » créée par l'opinion dominante des acteurs à un moment donné. Résister à cette pression pour jouer les « prophètes de malheur » est dangereux (pour sa carrière) et voué à l'échec.Pour autant, Orléan reste attaché au principe de la rationalité des acteurs, qui continue de dominer la pensée économique. Principe ou dogme ? Dans un livre qui commence à faire beaucoup de bruit, « Esprits animaux », le Nobel George Akerlof et son compatriote Robert Shiller y voient une dangereuse illusion. Les économistes de l'après-guerre, soutiennent-ils, ont un peu vite évacué de leurs analyses ces « esprits animaux » auxquels Keynes attribuait la responsabilité de la Grande Dépression. (1) Institut Diderot, 6 avril 2009. André Orléan publie chez Odile Jacob « l'Aveuglement au désastre. Le pouvoir de la finance ». La mousse et la bulle
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