Maurizio Pollini, un classique très moderneRegard intense, p...

Maurizio Pollini, un classique très moderneRegard intense, puis soudain éperdu, lointain. L'homme est là, mais l'esprit vagabonde, retrouve le passé : Chopin (son dernier disque), Bach, Beethoven, Debussy, ou s'affirme avec des compositeurs du XXe siècle, comme Schönberg, Berg et Webern, qu'il va donner en concert, avec son ami, le chef d'orchestre Pierre Boulez, dans le cadre des « Pollini Perspectives ».Car la salle Pleyel propose à l'un de ces derniers « monstres sacrés » du piano une série à l'image de son goût pour la musique ancienne, les classiques et la modernité du XXe siècle. Un projet qui a déjà été expérimenté avec succès à Salzbourg, Tokyo, New York ou Rome. Le nom de Maurizio Pollini sur une affiche suffit à attirer les foules.La lenteur du sagePerché au bord de son fauteuil, et pourtant détendu, il se couvre le front des deux mains avec la lenteur du sage en méditation, avant de relever la tête pour vous fixer et répondre à la première question. Il parle des figures historiques de l'avant-garde de l'après-guerre (Nono, Stockhausen, Berio et Pierre Boulez), et regrette que ces « classiques modernes » ne figurent pas encore dans le Panthéon de chacun, « contrairement à ce qui s'est passé pour les arts visuels de la même époque ? les peintres Pollock, Rothko ou Fontana sont entrés dans la vie de tous les jours. On devrait plus les apprécier, les fréquenter et en jouir ». Pourtant, pas un tableau, pas une estampe aux murs de ce salon marqué par le design des années 1970.Il a tout de l'enfant prodige. Piano dès l'âge de 5 ans, études au conservatoire de Milan. En 1960, du haut de ses 20 ans, il remporte le 1er Prix du concours Chopin de Varsovie ? le plus prestigieux ! Depuis cette époque, il n'aura cessé de repousser les propositions, ménageant des périodes de repli sur soi. Résultat ? Une quinzaine d'albums consacrés aux incontournables (Mozart, Beethoven, Chopin, Debussy) et à ses chers « classiques modernes ». Sa maison de disques se garde bien de lui demander d'associer son nom à des marques de luxe (comme elle le fait pour d'autres?). Déplacé? Son public le sait, lui qui l'apprécie pour sa sobriété un brin distanciée, son culte de la nuance et la maturité d'un jeu qui peut tout se permettre ? jusqu'à renouveler l'interprétation de Chopin (2e Sonate « Funèbre ») et Beethoven (dernières sonates, dont l'« Appassionata »).S'il demeure fidèle à Milan, sa ville natale, en revanche la situation politique actuelle en Italie l'afflige : « J'ai honte de ce qui se passe, c'est terrible? » Mais il ne veut pas continuer sur ce sujet. Lieux décalésSe souvient-il d'avoir été proche du Parti communiste d'Enrico Berlinguer et d'avoir joué dans des lieux décalés ? usines, places de village? ? « Bien sûr ! » s'exclame-t-il. Une époque qu'il ne renie pas, bien au contraire. « Pourtant, au début, je n'avais aucune conscience politique. Cela se passait dans le haut de l'Italie, en Émilie-Romagne. Avec le Quartetto Italiano et le Trio de Trieste, on se déplaçait dans des quartiers populaires en parlant des ?uvres avec la conviction d'atteindre des travailleurs, des étudiants et toute une frange de la population pour qui l'accès à la musique était un problème. Ce nouveau public ne comprenait peut-être pas tout ce qu'on jouait, classique ou moderne, mais il était ouvert, à l'opposé du conservatisme. » Presque quarante ans plus tard, c'est ce qui le frappe encore à la salle Pleyel : « Le public est très divers, j'observe la salle et je constate à chaque fois qu'il y a une part non négligeable de jeunes, et j'en suis ravi? ! » lance-t-il, radieux.Franck Mallet? « Pollini Perspectives » à Paris, salle Pleyel, le 13 juin : 20 h, Livre I du « Clavier bien tempér頻 de Bach ; de 10 à 60 ?. 01.42.56.13.13 et www.sallepleyel.fr.? Chopin, « Ballade n° 2 », 4 « Mazurkas », 3 « Valses », « Impromptu n° 2 », « Sonate n° 2 ». M. Pollini. 1 CD DG/Universal. 16 ?.Visage impassible, peut-être un léger rictus sur le dernier accord : Maurizio Pollini serait presque une machine sans état d'âme à son piano, pour qui le verrait sans l'entendre? Le virtuose nous reçoit dans son appartement parisien, place des Vosges.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.