« Je ne suis pas allé chercher le Fonds stratégique »

N'est-ce pas gênant de voir arriver un fonds public à votre capital ?Non. Nous savions que Texas Pacific Group (TPG) était vendeur d'une partie de sa participation, et je préfère un fonds français à mon tour de table qu'un fonds inconnu. Nous n'avions pas besoin du Fonds stratégique d'investissement (FSI), mais c'est vrai qu'en tant qu'investisseur à long terme il est un élément de stabilité appréciable de notre tour de table. Il soutient notre vision stratégique, et je m'en réjouis. Je n'ai pas le moindre doute qu'il proposera un administrateur susceptible d'apporter quelque chose à Gemalto.Avez-vous pris part aux discussions entre le FSI et le fonds américain Texas Pacific Group ?Non, je ne suis pas allé chercher le FSI. Pour être franc, Gemalto entre pleinement dans la définition des objectifs du Fonds, et j'étais persuadé qu'ils m'appelleraient au lendemain de sa création ! En fait, nous les avons longuement reçus il y a quelques mois, au même titre que tout autre fonds souverain ou d'investisseur institutionnel qui s'interroge sur l'opportunité d'un investissement à long terme dans Gemalto. Ensuite, il s'est agi d'une négociation entre le vendeur, TPG et les différents acquéreurs à laquelle je n'ai pas pris part. C'est ce vendredi matin que j'ai appris que le FSI et TPG avaient signé.Êtes-vous touchés par le ralentissement économique mondial ?Nous sommes assez peu dépendants de la consommation. Ce n'est pas parce que vous réduisez vos communications téléphoniques que vous n'avez plus besoin de carte SIM, ce n'est pas non plus parce que vous réduisez vos achats que vous abandonnez votre carte bancaire. Nous avons l'habitude de dire qu'un humain sur deux a un produit Gemalto dans la poche, ce qui nous laisse un potentiel de croissanc e important. D'une part, il y a l'autre moitié de l'humanité à conquérir, d'autre part, on peut faire en sorte que les gens aient plus d'un produit Gemalto sur eux. Gemalto n'est pas immune à la conjoncture, mais le fait d'être présent dans 200 pays nous rend plus sereins. Nous avons toujours eu dans notre portefeuille des pays en crise et d'autres en croissance. Aucun ne représente 10 % de notre chiffre d'affaires. Aujourd'hui, de grands marchés comme le Brésil et le Moyen-Orient se portent plutôt bien. Vous avez annoncé le 26 mai l'acquisition d'une société de logiciels de gestion des données personnelles sur mobile. N'est-ce pas déraisonnable de faire des emplettes en ce moment ?Au contraire ! Les petites entreprises qui ont une bonne technologie sont contentes de trouver un partenaire comme Gemalto. Il y a des opportunités. Nous avons aussi acquis une affaire sud-africaine il y a quelques mois et une société australienne il y a six mois. Il est vrai que le monde est dangereux en ce moment et qu'il faut garder un petit matelas financier. Nous avons une gestion prudente de notre cash que nous consacrons essentiellement à notre croissance organique et à de petites acquisitions. Et, depuis plusieurs années, nous ne distribuons pas de dividendes, nous préférons les rachats d'actions, plus souples. Pour quelles raisons le paiement par mobile ne décolle pas en France ?Dans notre monde, c'est rarement la technologie qui bloque. En revanche, ce qui paraît difficile c'est la capacité à mettre tout le monde d'accord. Chacun à peur que l'autre lui prenne son métier. Vous parlez des opérateurs mobiles et des banques?Oui. Arrive un moment où on se pose trop de questions. Il faut savoir prendre des risques. Heureusement que ceux qui ont lancé le GSM ne se sont pas demandés si le développement du mobile aurait des conséquences sur les cabines téléphoniques. Le problème est que la crise a tendance à rendre les acteurs rétifs au risque. Or si on n'innove plus, c'est un problème. En Afrique du Sud, à Taiwan ou en Colombie, le paiement par mobile existe. Nous travaillons dans certains pays sur des solutions qui vont bien au-delà de ce qu'on voit en France, et cela dépend souvent de la volonté du principal acteur local. En Afrique du Sud, par exemple, la télévision mobile personnelle a été lancée en mode prépayé, et ça marche ! En Turquie, il est désormais possible avec un mobile de faire de la signature électronique sécurisée de documents administratifs. Il y a aussi les marchés en croissance comme les passeports et la communication entre machines. À cet égard, vous ne regrettez pas d'avoir laissé s'échapper Wavecom en décembre ?Non. Ce n'était pas une acquisition indispensable. Nous sommes le numéro un mondial des puces communicantes pour le « machine to machine », et nous continuons à nous y développer de manière organique, comme avant. Sur le passeport électronique, nous croissons de plus de 25 % par an, nous sommes également le numéro un mondial. 40 pays nous ont déjà fait confiance.Propos recueillis par Jean-Baptiste Jacquin et Olivier Pinaud
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