Le gouvernement divisé sur les class actions

Introduire une action de groupe en droit français, plus connue sous le nom anglo-saxon de class action (possibilité pour un groupe de consommateurs de poursuivre en justice une entreprise) : Nicolas Sarkozy s'y était engagé pendant sa campagne électorale, engagement confirmé par la suite. Mais le projet, toujours en arbitrage ministériel, prend du retard. Il devait être présenté à l'automne. Il ne sera pas soumis au Conseil des ministres avant janvier. C'est qu'il divise le gouvernement. Pour la première fois, la ministre de l'Économie, Christine Lagarde, n'a pas hésité en duplex de Bercy avec environ 4.000 avocats présents dans le Zénith de Lille, à dévoiler son sentiment personnel : « Je ne suis pas personnellement convaincue des vertus de l'action de groupe. » Pourtant, dans sa lettre de mission du 11 juillet 2007, le président Sarkozy lui avait demandé de « créer une action de groupe à la française » avec le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme, Luc Chatel, partisan du consumérisme. Ce dernier a beau être rattaché à la ministre de l'Économie, il a souligné encore récemment que le chef de l'État avait rendu son arbitrage pour introduire une action de groupe afin de régler les litiges de la vie quotidienne. « C'est un vieux projet. Aujourd'hui, la majorité y est favorable. On va le faire », a-t-il insisté. Le sujet de l'action de groupe avait été relancé en 2005 par le président Chirac. Au lendemain de l'intervention de Christine Lagarde, l'entourage de Rachida Dati, ministre de la Justice, chargée avec Bercy de porter le futur projet de loi sur la dépénalisation du droit des affaires comprenant un volet sur une action de groupe à la française, n'était pas au courant de la prise de position de la ministre de l'Économie. Ancienne responsable d'un cabinet d'avocats d'affaires international, Christine Lagarde s'appuie sur son expérience américaine pour dénoncer les travers de l'action de groupe outre-Atlantique. La class action consiste à permettre à des personnes victimes d'un préjudice similaire auprès d'une même entreprise d'agir en justice ensemble contre elle. Aux États-Unis, elle peut aussi être actionnée au départ par un seul individu lorsque le juge le reconnaît représentatif d'un groupe (système dit « opt out ») et ne se limite pas au seul droit de la consommation. Si l'entreprise est condamnée à des dommages punitifs, les autres victimes reconnues appartenir au groupe peuvent alors se manifester pour réclamer leur part d'indemnisation. « La capacité de nuisance des actions de groupe est souvent mal appréhendée », prévient Christine Lagarde. Et elle avertit qu'elles peuvent être une « arme fatale » à l'encontre des entreprises en se référant à l'exemple américain. Une position proche de celle du Medef, opposé à une action de groupe à la française.dépénalisationDans son rapport à la garde des Sceaux, le groupe de travail sur la dépénalisation de la vie des affaires présidé par le haut magistrat Jean-Marie Coulon a fait de la mise en place d'une action de groupe le corollaire de la dépénalisation du droit de la consommation. Le recours proposé serait encadré. Seules les associations agréées seraient recevables. Et le résultat de l'action de groupe bénéficierait uniquement aux consommateurs ayant saisi la justice (système dit « opt in »).Dans sa proposition de loi déposée en 2006 à l'Assemblée nationale, Luc Chatel, à l'époque député, allait plus loin. Son texte proposait de réserver l'action de groupe aux seules associations agréées mais dans une seconde phase permettait le système de l'« opt out » pour les consommateurs ayant subi un préjudice d'un faible montant. « À tous ceux qui voudraient agiter la menace des dérives américaines, il faut rappeler ici que c'est précisément pour éviter les dérives du système américain qu'il est important que la France se saisisse de cette question », expliquait Luc Chatel. Le projet de loi sur la dépénalisation du droit des affaires serait déposé début 2009 au Parlement.Le sujet de l'action de groupe avait été relancé en 2005 par le président Chirac.
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