Les ministères ne sont plus des sanctuaires judiciaires

Des magistrats instructeurs qui se présentent à la porte d'un ministère accompagnés d'officiers de police judiciaire, la scène, impensable il y a quelques années, est devenue presque courante. Les palais de la République ne sont plus des sanctuaires judiciaires. Le phénomène est né avec le développement des "affaires" au milieu des années 90 et de l'émancipation des juges vis-à-vis du pouvoir politique. Désormais, la liste des ministères perquisitionnés est longue : Intérieur, Santé, Affaires étrangères, Défense, Agriculture... Sans oublier la chancellerie, à deux reprises, et même Matignon. Les bureaux du Premier ministre ont ainsi ouvert leurs archives en 2000 à des magistrats dans le cadre de l'affaire sur la privatisation de l'armateur CGM. Un dossier qui a également valu à Bercy une petite visite de magistrats qui, le moins que l'on puisse dire, connaissaient bien le chemin du ministère de l'Economie et des Finances. Celui-ci, et ses différentes directions, détient en effet le record des perquisitions.Avant Rhodia, les juges ont par exemple été conduits à s'intéresser aux bureaux de la direction du Trésor et de l'inspection des finances dans le cadre de l'instruction sur les comptes du Crédit Lyonnais. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a elle été impliquée dans l'affaire de la vache folle et celle du budget dans un dossier d'abus de biens sociaux concernant notamment l'Assistance publique. Ceci sans parler d'épisodes un peu plus particuliers, comme celui de la cassette Méry, égarée par Dominique Strauss-Kahn, alors ministre de Lionel Jospin.Immunité pénale. Jusqu'à présent, parmi les lieux de pouvoir, seul le bastion élyséen a résisté. Le chef de l'Etat bénéficiant d'une immunité pénale tout au long de son mandat, l'éventualité d'une perquisition dans le palais présidentiel ne manquerait pas de soulever quelques difficultés juridiques. Ce qui n'est pas le cas des ministères dont les locataires ne bénéficient pas d'une protection particulière. Depuis la "jurisprudence Balladur", érigée lors de la deuxième cohabitation, il est même admis qu'un ministre mis en examen ou sur le point de l'être doive démissionner même si comme tout justiciable il est considéré comme présumé innocent. Alain Carignon en premier suivi de plusieurs autres ont été victimes de cette jurisprudence. Les derniers en date sont Dominique Strauss-Kahn et Pierre Bédier.Pascal Hénisse
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