Eurotunnel : le mois de sursis accordé

La société Eurotunnel a annoncé hier que « le président du tribunal de commerce de Paris a accepté la demande des coprésidents de prolonger jusque au 31 juillet 1996 la mission des deux mandataires ad hoc, avec l'avis favorable de ceux-ci ». Robert Badinter et lord Wackeham avaient été chargés le 12 février d'une mission de conciliation entre Eurotunnel et ses créanciers, dans le but de rapprocher les positions des deux parties. La mission a pris fin le 30 juin et Patrick Ponsolle, le PDG d'Eurotunnel, a expliqué devant l'assemblée générale du 27 juin qu'il y avait déjà un « accord tacite avec les banques sur quelques principes de base ». L'essentiel du conflit d'intérêts entre la société et ses banquiers porte sur le montant de la dette qui resterait inscrite au passif à l'issue de la restructuration financière (la dette actuelle représente 20 fois le chiffre d'affaires). Me Berlioz, l'avocat de l'Adacte (Association des actionnaires d'Eurotunnel), voit dans cette décision un indice du fossé qui sépare les deux parties. « Le report semble montrer que les négociations sont plus que difficiles », réagissait-il hier, en espérant qu'il ne s'agisse pas d'une manoeuvre du pool des créanciers pour se donner plus de chance d'aboutir à la fameuse « clause de substitution » (le droit de confisquer le tunnel et de confier son exploitation commerciale à une autre société). Me Berlioz conteste la validité juridique de cette clause dans le cas précis d'Eurotunnel, tout en recommandant de s'en protéger grâce à la procédure du dépôt de bilan (trop souvent confondue avec la liquidation judiciaire, elle a pour premier effet d'entraîner une restructuration du passif). La loi de 1985 sur le redressement judiciaire des entreprises a en effet prévu une graduation : plus l'entreprise accepte de mettre sur la table une évaluation honnête de sa situation financière... et moins ses propriétaires sont pénalisés au moment du partage des sacrifices. Me Berlioz dispose de plusieurs fers au feu. Il a aussi rappelé, lors de l'assemblée générale d'Eurotunnel, les principes juridiques de continuation des contrats. Dans le cas concret d'Eurotunnel intervient en plus le droit particulier des concessions. La peur générée par cette clause de substitution ne devrait plus pousser les petits porteurs à vendre leurs titres au plus bas. NICOLAS THIÉRY
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