1995, une année exceptionnelle pour Wall Street

Après avoir tenté des expériences troublantes sur les marchés émergents en 1992, 1993 (vive hausse) et 1994 (krach), les gestionnaires de fonds américains sont restés chez eux en 1995. Bien leur en a pris. Wall Street a progressé de plus de 30 % l'année dernière et l'indice Dow Jones des trente valeurs industrielles a inscrit 69 records. Une véritable histoire d'amour s'est tissée entre le public américain et les marchés financiers et la composante financière de l'épargne américaine a augmenté (plus d'actions et d'obligations, moins d'immobilier). Il faut dire que la presse américaine y a mis du sien, en publiant régulièrement des opinions avisées sur la performance supérieure des actions sur le long terme par rapport aux obligations, voire à l'immobilier. 1995, engouement pour les valeurs d'Internet L'important mouvement de fusions et acquisitions aux Etats-Unis, la prodigieuse décrue des taux d'intérêt à long terme et l'ascension fulgurante des valeurs technologiques pendant le premier semestre ont soutenu la tendance. L'année 1995 restera comme celle de la découverte du monde Internet et des multiples possibilités du Word Wide Web (le Web, son sous-ensemble multimédia). D'immenses fortunes ont été créées l'année dernière avec Internet. Pas en vendant des choses sur le réseau mais en introduisant des sociétés spécialisées en Bourse. Jim Clark, le fondateur de Netscape, éditeur d'un logiciel pour « naviguer » sur Internet, est devenu le milliardaire le plus rapide de l'histoire des Etats-Unis. Le 29 décembre, la capitalisation boursière de Netscape était supérieure à 5 milliards de dollars. L'engouement pour les valeurs d'Internet est dangereux. Il rappelle la folle envolée des « nifty-fifty », les titres des conglomérats et des valeurs de croissance à la fin des années 60. Cet engouement s'était terminé par une brusque chute de tension. Or quelques valeurs de haute technologie ont déjà fait les frais d'abandons massifs. Cirrus Logic est la dernière société en date. Sa capitalisation boursière est passée de 3,65 milliards de dollars en septembre à 1,25 milliard aujourd'hui. Cirrus Logic est une des sociétés les plus innovantes de la Silicon Valley. Malheureusement, ses bénéfices seront affectés par une baisse de la demande pour ses produits. D'autres titres « high-tech » pourraient suivre son chemin, sans toutefois affecter l'ensemble du marché. Pour 1996, les milieux de Wall Street espèrent que la croissance économique américaine sera modérée sans mettre à mal les bénéfices des entreprises. Ils tablent donc sur une baisse des taux longs et sur un accroissement des profits des firmes multinationales. Dans ce contexte, une reprise rapide de la consommation vers la fin du premier trimestre pourrait bousculer les hypothèses sur la baisse des taux longs. Autre risque à ne pas oublier pour le marché américain, une petite spéculation intervient sur le marché obligataire. Les fonds de spéculation ont vendu à découvert le yen (ils attendent une poursuite de la baisse de la monnaie japonaise) et acheté dans le même temps des bons américains du Trésor (ils anticipent une poursuite de la hausse de leur cours, donc de la baisse des taux longs). Si l'une des deux composantes de cette stratégie ne fonctionne pas (hausse du yen ou hausse des taux), un débouclement rapide et désordonné des positions pourrait affecter le marché obligataire. La Bourse américaine en ressentirait l'onde de choc. Récemment, un stratège américain évoquait une fourchette de variation comprise entre 5.400 et 4.800 points pour l'indice Dow Jones. Pascal Boulard
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