Le verdict américain contre Vivendi met en cause sa défense

Le procès fleuve de la class action s'est achevé vendredi par une déclaration de culpabilité de Vivendi, lavant Jean-Marie Messier (J2M) et Guillaume Hannezo, les dirigeants d'alors, de toute responsabilité (lire notre édition numérique du samedi 30 janvier). Un procès qui n'aurait pas dû avoir lieu. En effet, dans la plupart des cas, les entreprises poursuivies dans des class actions préfèrent transiger plutôt que d'aller au procès. Pourquoi pas ici ? Officiellement, Vivendi déclare n'avoir reçu « aucune proposition officielle de transaction ». « Selon ma compréhension, une proposition a bien été faite », répond Maxime Delespaul, l'avocat des plaignants français. La porte ne semble toujours pas fermée. Arthur Abbey, avocat américain des plaignants, interrogé vendredi après le verdict des jurés, assurait : « Nous sommes toujours heureux de pouvoir parler avec Vivendi. »La très longue durée du procès est due à la volonté des plaignants d'aborder moult sujets, dont certains étaient très techniques, et donc difficilement compréhensibles par un jury populaire n'ayant pas de connaissances financières. Ce faisant, l'accusation a pris le risque de lasser le jury. Mais, pour l'avocat de Vivendi, Hervé Pisani, « l'accusation ne tenait pas la route sur le sujet central de la crise de liquidité. Les plaignants ont donc à dessein allumé de multiples autres feux, sur des sujets très techniques, présentés de manière biaisée, afin de créer l'illusion que Vivendi mentait sur tout. L'objectif était clairement de créer la confusion dans l'esprit des jurés. Lors de la constitution du jury, ils avaient écarté tout juré pouvant avoir des connaissances financières ou comptables ».contradictionsEn face, l'accusation estime que Vivendi s'est mal défendu. Arthur Abbey a souligné que la défense n'a présenté que quatre témoins. Le président du conseil de surveillance, Jean-René Fourtou, n'a pas témoigné en chair et en os, malgré ce qui avait été annoncé. Le tribunal a dû se contenter d'une vidéo. Surtout, le groupe a tenté de minimiser la crise de trésorerie subie en 2001-2002. Or, Jean-René Fourtou avait détaillé par le menu cette crise à de multiples reprises dès son arrivée en juillet 2002, et jusqu'à son témoignage vidéo recueilli en 2007. En 2003, Vivendi avait même, dans une procédure concernant les indemnités de J2M, accusé l'ex-PDG d'avoir caché la situation à son conseil d'administration.Le groupe se retrouvait donc face à un dilemme. S'il confirmait ces accusations passées, alors il apportait de l'eau au moulin des plaignants. Il a plutôt choisi de les nier, mais en créant des contradictions dans lesquelles l'accusation s'est engouffrée. « Si, comme le prétend Vivendi, il n'y a pas eu de crise de trésorerie, ou alors qu'elle n'a duré qu'une semaine au début de juillet 2002, alors pourquoi, en août 2002, Fourtou, Bébéar et Espinasse négociaient encore avec les banques, la nuit jusqu'à 3 heures du matin, au lieu d'être en vacances, comme le sont tous les Français à cette époque ? », s'est interrogé Arthur Abbey, l'avocat des plaignants.La sévérité du verdict (Vivendi est déclaré coupable sans restriction des cinquante-sept chefs d'accusation) n'enlève rien de la confiance affichée par le groupe français dans sa capacité à sortir indemne de cette procédure.
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