Le monde à Quai

hotographieIls ont parcouru le monde, d'Amérique en Asie, d'Océanie en Afrique, en passant par le Moyen-Orient. De ces voyages au long cours, les commissaires de Photoquai ? la biennale de photographie non occidentale imaginée par Stéphane Martin, le président du musée du Quai Branly et inaugurée en 2007 ? ont rapporté une extraordinaire moisson d'images à découvrir au plus vite le long de la Seine, face au musée. Regroupés par artistes, en couleur ou en noir et blanc, documentaires ou plasticiens, drôles, poétiques ou poignants, au format souvent gigantesque, ces tirages disent les hommes, racontent le monde dans sa particularité ou dans son universalité. Et c'est magnifique.Trois thèmes émergent au fil de cette balade. À commencer par celui de l'identité. Ainsi ces portraits d'anciens combattants saisis par le Réunionnais Raymond Barthes sur son île, en 2007. Il y a là des Noirs, des Békés, des Indiens. La France dans toute sa diversité. Tous ont été photographiés à la chambre en noir et blanc avant que leur portrait soit colorisé à l'ordinateur. Et c'est soudain l'iconographie des héros de guerre qui s'en trouve bouleversée.L'Algérienne Nadia Ferroukhi a rapproché, dans ses diptyques aux couleurs affirmées, la Cité radieuse construite par Le Corbusier en 1952 à Marseille et l'Aéro-habitat érigé par ses disciples à Alger en 1955. Et l'on en vient à se demander si le fossé énoncé à longueur de débat entre les deux pays existe vraiment tant il est difficile de distinguer ce qui différencie la manière de vivre des familles françaises des algériennes. Et puis il y a l'?uvre fellinienne du Chinois A Yin sur la Mongolie, dont une irrésistible mère à l'enfant glouton qui ne sera certainement jamais rassasié des seins opulents de sa maman.En FiligraneLes questions d'environnements se sont, elles aussi, invitées à Photoquai. Aux imposantes photos gothiques de l'Antarctique par la Néo-Zélandaise Joyce Campbell, on préfère celles, mélancoliques, d'une poésie à fleur de peau, du Marocain Khalil Nemmaoui. Notre homme a dressé le portrait en couleur de quelques arbres de la périphérie de Casablanca. Survivants pour quelques heures, quelques jours encore. Les uns sont nus, implorant les cieux tourmentés de leurs bras décharnés. D'autres ont baissé la garde, recroquevillés au sol en attente d'une mort lente mais certaine. Et derrière cette douceur à la William Eggleston, c'est toute la violence d'une urbanisation hystérique qui apparaît en filigrane.De violence, il est aussi question dans les photos gore férocement drôles de la Mexicaine Daniela Edburg. Dans sa ligne de mire, la société de consommation, conspuée à travers d'hilarants portraits de jeunes filles suicidées aux gâteaux ou attaquées par un nuage rose de barbe à papa.Au fond, c'est cela qui plaît le plus dans cette biennale. Cette manière d'embrasser l'histoire, les drames de la planète ou les problèmes de société, mais jamais de manière littérale, en cherchant une forme et une esthétique originale. Rien de tel pour gommer les frontières entre les hommes. nExposition présentée sur les quais de la Seine longeant le musée du Quai Branly.Jusqu'au 22 novembre. www.photoquai.fr.
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