Canal Plus échappe à une régulation de la télévision payante

Mercredi à midi, François Fillon invite six ministres à débattre des exclusivités dans l'audiovisuel. Sauf retournement surprise, cette réunion doit enterrer l'idée d'une loi sur le sujet, au moins à court terme. Une telle loi avait été réclamée par l'Autorité de la concurrence, puis par la conseillère d'État Marie-Dominique Hagelsteen dans un rapport commandé par Matignon. Elle devait principalement instaurer une régulation a priori de la télévision payante, essentiellement de son acteur dominant, Canal Plus.L'abandon de cette loi est donc une nette victoire pour la chaîne cryptée. C'est aussi un succès pour les ministres de la Culture et des Sports, qui auraient apparemment rallié Matignon à leur point de vue. Ces deux ministres craignaient qu'une régulation de la filiale de Vivendi ne réduise l'argent versé au cinéma et au football. Un argument discutable, car les obligations vis-à-vis du cinéma sont assises sur le chiffre d'affaires de la chaîne cryptée. Alors que la régulation envisagée voulait s'attaquer aux marges dégagées par le bouquet satellite CanalSat dans la distribution de chaînes thématiques.En revanche, ce renoncement est un revers pour Bercy et le secrétariat d'État au Numérique, qui étaient favorables à une telle loi. Ils estimaient que le marché de la TV payante n'est pas assez concurrentiel, reprenant ainsi la position des opérateurs télécoms, du gendarme de la concurrence, de celui des télécoms (Arcep), et du rapport Hagelsteen. Ce dernier soulignait que la TV payante est déjà régulée a priori aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Italie et en Australie. « Mais cela serait une mesure lourde. N'est-ce pas aller vers une économie administrée ? », balaye une source gouvernementale.décision ambivalente Pour Orange, cette décision est ambivalente. D'un côté, c'est un revers, car la filiale de France Télécome;lécom espérait aussi une régulation a priori de Canal Plus, son meilleur ennemi. Mais c'est aussi un soulagement, car cette loi aurait aussi pu empêcher Orange de réserver ses chaînes de télévision à ses seuls clients ADSL. Telle était en tout cas la suggestion initiale de l'Autorité de la concurrence. Mais le rapport Hagelsteen n'avait pas repris cette suggestion, se contenant de proposer une régulation beaucoup plus légère (notifier les achats de contenus exclusifs à l'Arcep). Une position qui faisait consensus au sein du gouvernement, où l'on va étudier si un texte est nécessaire sur ce point. Bref, pour Orange, l'idée d'une loi le régulant lourdement s'était déjà éloignée.Pour autant, toute menace n'est pas écartée pour Orange. En effet, l'Autorité de la concurrence peut très bien lui interdire de réserver ses chaînes de TV à ses clients, comme elle l'a déjà fait pour l'iPhone. Une procédure est en cours sur ce point.En revanche, l'horizon s'éclaircit pour Canal. Certes, le gendarme de la concurrence poursuit aussi la chaîne cryptée pour ses pratiques anticoncurrentielles. « Et il peut lui imposer pas mal de choses dans ce cadre », souligne un opposant à la loi au sein du gouvernement. En pratique, la filiale de Vivendi pourrait écoper d'une amende et/ou d'obligations, par exemple de proposer certaines chaînes qu'il édite à tous les opérateurs télécoms. Néanmoins, les pouvoirs du gendarme de la concurrence sont strictement limités dans une procédure contentieuse de ce type. Par exemple, il ne peut pas imposer de régulation a priori. Il ne peut pas non plus prolonger toutes les obligations imposées à Canal lors du rachat de TPS, et qui expirent en 2012-13. C'est pour dépasser ces limites qu'il avait demandé ? en vain ? une loi.
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