La gouvernance des PME est une arme économique

Le rôle moteur des PME dans l'économie est enfin pris en compte et force est de rendre hommage aux réflexions conduites et aux mesures prises en leur faveur depuis le début de la crise. De la protection du patrimoine de l'entrepreneur à la médiation du crédit, de la création du FSI à l'action d'Oséo, les efforts menés prouvent leur efficacité. D'autres actions sont en cours, qui visent notamment à adapter le marché financier aux besoins des PME, à permettre aux institutionnels de rester des investisseurs actifs dans ces entreprises malgré le durcissement de la réglementation, et demain, aux entreprises de taille intermédiaire de bénéficier de régimes propres à leur donner les moyens de leur croissance.Il est cependant un sujet dont l'importance est reconnue mais dont on parle peu : l'accompagnement des PME, pourtant aussi fondamental que le besoin de soutien financier. Les patrons de PME, qu'elles soient petites, moyennes ou plus grosses, sont souvent seuls et confrontés à un rythme quotidien qui leur laisse peu de temps pour prendre le recul nécessaire à une pensée stratégique, à la refonte de leur organisation ou à l'analyse d'opportunités de croissance. Leurs décisions sont souvent liées à leur disponibilité du moment ou à leur instinct professionnel. Ils ont besoin d'échange, d'ouvertures, d'enrichissement de leurs réflexions, d'appuis et d'interlocuteurs avec lesquels se confronter. Ce que devrait leur apporter une bonne gouvernance, s'ils n'avaient pas coutume de ne voir siéger que des proches dans leur conseil d'administration, ou si ce mot ne les faisait pas fuir. Car l'image de la gouvernance n'est pas bonne dans les PME : soit elle évoque le contrôle et les contraintes de grandes sociétés cotées, soit elle renvoie à une notion de perte de pouvoir. Et il est vrai que la pratique de la gouvernance dont on parle souvent est celle des grandes entreprises cotées, contrôle plus qu'appui, peu adaptée à la situation des PME.Cette gouvernance-là s'est en effet construite sur une série de crises de confiance d'investisseurs institutionnels dans le management des grands groupes cotés, et les grands thèmes abordés sont ceux de la transparence, de la rémunération des patrons, de la défense des minoritaires et de l'audit. Aucun de ces sujets ne concerne vraiment les PME, dont les actionnaires sont le plus souvent familiaux. Leurs patrons sont donc souvent loin de réaliser que des administrateurs peuvent être une ressource de qualité, mobilisable presque à volonté et dans des conditions uniques.De bons administrateurs de petites, moyennes ou plus grosses entreprises peuvent être pour le chef d'entreprise une ressource que toutes les grandes entreprises ont en interne : une cellule de pensée stratégique et d'organisation. Ils peuvent être bien plus : des auditeurs attentifs, informés et disponibles pour un dirigeant souvent trop seul, des compétences de haut niveau et complémentaires, des interlocuteurs stables et de confiance, des leviers, des personnes avec lesquelles s'interroger sur la relation entre intérêt patrimonial et intérêt de l'entreprise, des hommes et femmes d'expérience pour conseiller et éclairer des situations difficiles, des personnes qui repèrent les sources d'amélioration des organisations. Ces perles rares existent et sont prêtes à s'engager, à donner de leur temps et de leur expérience. Ce sont souvent d'autres patrons et en tout cas des personnalités qualifiées et de caractère. Ils sont dans les réseaux patronaux locaux ou d'autres, comme les associations d'administrateurs. Ils sont motivés par l'intérêt de leur mission et l'enrichissement de leur propre expérience, non par un intérêt immédiat et purement financier.Mais encore doivent-ils être mobilisés par le dirigeant, et mis en situation d'être efficaces : car ils ne peuvent pleinement apporter leur compétence que si leur travail est préparé, que s'ils sont justement informés et peuvent être en contact avec l'entreprise. Il ne peut exister de gouvernance utile que voulue et bien organisée par le dirigeant. Et encore faut-il que les conditions de leur intervention soient plus favorables qu'elles ne le sont : le régime des jetons de présence et les possibilités d'intéressement ne sont pas attractifs pour ce type d'activité, compte tenu du temps et de la disponibilité qu'elles requièrent. Un bon environnement du dirigeant, dont relève le conseil d'administration, peut sans nul doute participer à insuffler dans nos PME une dynamique de croissance que nos voisins européens ont aujourd'hui plus que nous, comme vient de nous le redire le rapport Retailleau.Point de vue Anne BINDER Fondatrice d'administrance
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