Avions ravitailleurs : exercice de haute voltige pour EADS

Ira, ira pas ? Dilemme chez EADS, qui hésite à participer à l'appel d'offre du ministère de la Défense américain (DoD) portant sur l'achat de 179 avions ravitailleurs pour un montant estimé à 35 milliards de dollars. Bien sûr, le groupe européen est plus que tenté de se jeter dans la compétition, surtout en tant que maître d'oeuvre (prime contractor) mais le contexte lui reste largement défavorable. En réalité, le Pentagone a peu cédé, malgré les cris d'orfraies du concurrent américain Boeing, aux revendications d'EADS, relayés par Nicolas Sarkozy à l'occasion de sa visite aux Etats-Unis. Et ce, malgré les promesses de Barack Obama qu'il s'agira d'un " processus libre, loyal ".Chez EADS, on reste très prudent sur ce dossier. D'autant que le chef de l'Etat français semblait prêt à se substituer au conseil d'administration d'EADS pour lancer le groupe européen dans la compétition. Réponsee;ponse dans quinze jours.Risque financier Pourtant, la tendance aujourd'hui au sein des dirigeants est ne pas se lancer dans cette compétition. Pour trois raisons essentielles. La première est d'ordre financier. Le groupe ne se lancera pas dans une campagne de promotion de l'A330 MRTT de cette ampleur, qui coûte environ 50 millions de dollars, sans avoir l'assurance de pouvoir gagner.Surtout les risques industriels à venir restent importants pour un contrat de cette ampleur, qui plus est, pris dans des conditions économiques neutres, sinon proches. Car EADS, s'il devait y aller, devrait tirer les prix au maximum pour avoir une chance de gagner. " Cette compétition est uniquement centrée sur les prix ", rappelle-t-on en interne. Mais " il est exclu que l'on perde de l'argent sur ce contrat ", assurent plusieurs sources dans le groupe.Limite de faisabilitéEADS et Airbus, qui avaient demandé une prolongation de l'appel d'offre de 90 jours, ne sont pas sûrs non plus de pouvoir rendre une proposition conforme (compliant) dans les 60 jours exigés par le Pentagone. Une décision du DoD, qui est " loin d'être loyale, note-t-on dans le groupe. Le Pentagone ne veut pas d'un appel d'offres sans compétition tout en ne souhaitant pas réellement un vrai match ". Ainsi, comme le résume une source proche du dossier, " nous n'étions pas sûrs de pouvoir rendre une offre avec un délai de grâce de 90 jours. Là nous sommes dans les limites de la faisabilité technique ". " C'est quasiment mission impossible ", estime une autre source en interne. Car EADS, qui s'est déjà mis en ordre de bataille au cas où, doit s'approprier une quantité énorme de nouvelles données, notamment celles accumulées par Northrop Grumman en tant que maître d'oeuvre. " Nous ne voulons pas déposer une offre qui pourra être disqualifiée par des juristes ", confirme-t-on dans le groupe.Période électoraleEnfin, le Pentagone propose d'avancer la décision de quelques semaines. Une décision louable sauf qu'elle va tomber pendant la campagne des élections pour le renouvellement de la moitié du Congrès en novembre, à mi-mandat de Barack Obama. On a dû mal à imaginer l'administration américaine donner un tel contrat à un groupe européen, a fortiori à cette période-là.Pour ceux qui veulent se lancer dans la compétition, à commencer par le PDG d'Airbus Tom Enders et le directeur de la division Airbus Military Domingo Urena-Raso, EADS dispose d'atouts dans sa manche. Avion performantNotamment le groupe dispose de l'avion ravitailleur le plus performant du moment sur le plan opérationnel. Comme en témoignent ses nombreux succès à l'export : Australie, Emirats arabes unis, Arabie saoudite, Grande-Bretagne. En outre, L'A330 MRTT existe et vole. Sur le plan technologique, ce programme est largement " dérisqué contrairement au B767 de Boeing ", assure-t-on dans le groupe. EADS a par ailleurs une meilleure visibilité sur les prix en tant que maître d'oeuvre. Enfin, Sean O'Keefe, récemment arrivé chez EADS North America's, est un habitué des discussions serrées avec le Pentagone quand il était chez General Electric.
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