Gilles Carrez : "les oeuvres d'art ne doivent plus être exonérées d'ISF"

 L\'ISF va être à nouveau au menu des discussions budgétaires. Quelle serait la bonne réforme, pérenne, de cet impôt ? -Je crois qu\'il faut d\'abord s\'interroger sur l\'opportunité de conserver un impôt sur le patrimoine ou non. Pour des raisons à la fois économiques, sociales, et budgétaires, je répondrais oui à cette question. Economiques : taxer le stock de patrimoine a du sens, car cela contraint les « riches » à assurer rentabilité minimale de leur fortune, ce qui favorise une bonne allocation des actifs, une orientation vers les placements productifs. Au point de vue politico-social, on a vu récemment un tel accroissement des écarts de richesse (surtout en termes de patrimoine donc), qu\'un tel impôt ne peut qu\'aller dans le sens de la cohésion de notre société. Enfin, si l\'on adopte le prisme budgétaire, on voit tout de suite l\'intérêt d\'un impôt basé sur la fortune, beaucoup moins volatil, au gré de la conjoncture, que ne peut l\'être la taxation des bénéfices, par exemple. C\'est un moyen pour l\'Etat de s\'assurer des recettes relativement stables.-A quoi devrait donc ressembler l\'ISF ?-Ce qui est clair, c\'est que le choix que fait le gouvernement socialiste, celui d\'un ISF très élevé, assorti d\'un système de plafonnement pour éviter la spoliation, est voué à l\'échec. Les socialistes, qui sont en passe d\'adopter un barème purement idéologique (allant jusqu\'à taxer le patrimoine à hauteur de 1,8%), accompagné du rétablissement d\'un plafonnement en fonction du revenu, vont très vite s\'en rendre compte.Il faut bien voir qu\'en 1982, l\'impôt sur les grandes fortunes allait jusqu\'à 1,5% du patrimoine, mais les rendements des placements obligataires atteignaient alors 17% ! L\'impôt n\'avait donc rien de spoliateur. Ce qui n\'est plus le cas aujourd\'hui, avec un impôt frappant  à hauteur de 1,8% les patrimoines, alors que leur rentabilité est inférieure à 3%.Pourquoi le système de plafond en fonction du revenu ne fonctionne-t-il pas ?-Parce qu\'on rapporte un impôt bien défini, l\'ISF, à un revenu que les contribuables riches sont parfaitement capables d\'administrer. Ils sont en mesure de dériver leurs revenus vers des personnes morales -système de holding, utilisé notamment par Liliane Bettencourt- ou d\'utiliser des niches fiscales pour minorer artificiellement leurs revenus. Dès, lors que ceux-ci sont apparemment très faibles, ils peuvent obtenir le remboursement d\'une grande partie de leur ISF. Ce qui est, politiquement, intenable, c\'est une véritable boîte à claques politique, comme on l\'a vu avec le bouclier fiscal.La solution, alors ?-Elle est simple : retenir un ou deux taux d\'imposition, relativement bas, comme nous l\'avions fait en 2011. Du reste, Jérôme Cahuzac, alors président de la commission des finances de l\'Assemblée (il est aujourd\'hui ministre délégué au budget, NDLR) était d\'accord avec moi sur ce point.-Et peut-on élargir l\'assiette ? On a parlé d\'inclure l\'outil de travail ?- Ce serait un non sens. Les actifs productifs sont taxés par ailleurs, à travers la taxe professionnelle, la masse salariale liée à la production qu\'ils permettent, La solution hollandaise me paraît, de ce point de vue, aventureuse : c\'est un système de boites avec différents taux selon la nature du capital. Un objet d\'études universitaires, non transposable en France.-D\'autres pistes ?-A l\'heure où les œuvres d\'art sont devenues l\'un des premiers placements spéculatifs, il faudrait à l\'évidence revenir sur leur exonération. Peut-être avec un système spécifique d\'abattement, jusqu\'à 500.000 euros, mais leur exonération totale n\'est plus justifiable. 
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