Apple, Microsoft… Pourquoi les fonds activistes se déchaînent contre les "blue chips"

Pas sûr que Tim Cook ait savouré son dîner de lundi. Le patron d\'Apple avait à sa table le célèbre investisseur activiste Carl Icahn, qui s\'était invité mi-août dans le capital du géant de l\'électronique - à hauteur de 0,5% - afin de l\'inciter à faire un meilleur usage de sa trésorerie pléthorique de 146 milliards de dollars.\"Ai eu un dîner cordial avec Tim. J\'ai poussé énergiquement à un rachat d\'actions de 150 milliards de dollars. Nous avons décidé de poursuivre le dialogue dans trois semaines environ\", a relaté mardi sur Twitter le redouté Carl Icahn.Ces quelque 140 caractères ont fait bondir l\'action Apple de 2%, ce qui, sur la base d\'une capitalisation boursière de 443 milliards de dollars, représente un gain de près de 9 milliards. Bill Gates aura-t-il bientôt droit à un dîner de ce genre ? En tout état de cause, trois des 20 premiers actionnaires de Microsoft, qui représentent ensemble 5% du capital environ, souhaitent que Bill Gates quittent le conseil d\'administration de l\'éditeur de logiciels, afin que ce dernier puisse donner un nouvel élan à sa stratégie, selon l\'agence Reuters.Quelques semaines plus tôt, c\'est le fonds d\'investissement activiste ValueAct, dirigé par Jeffrey Ubben, qui avait obtenu, chez Microsoft toujours, le départ du big boss du groupe, Steve Ballmer. Les sociétés américaines affichent une trésorerie de 1.800 milliards de dollars L\'été avait également été émaillé par la rixe entre Sony et Third Point, le fonds activiste de Daniel Loeb, qui réclamait une scission entre la firme nippone et ses activités de divertissement. Plus près de nous, EADS subit depuis le mois d\'août la pression du fonds TCI (The Children\'s Investment Fund), qui, avec 1% du capital, exige que le groupe d\'aéronautique et de défense vende ses 46% dans Dassault Aviation.Une participation qui constitue « une mauvaise utilisation du capital » d\'EADS, selon TCI. Au total, le cabinet FactSet SharkRepellant dénombre 14 campagnes de fonds activistes contre des entreprises pesant plus de 1 milliard de dollars en Bourse, sur le seul premier semestre, contre 21 pour l\'ensemble de l\'année 2012 et… 4 en 2003, il y a tout juste dix ans.Pourquoi les fonds dits activistes, considérés par les uns comme des Robins des Bois volant au secours des petits porteurs et par les autres comme d\'affreux raiders égoïstes et sans scrupules, se déchaînent-ils maintenant ? D\'abord parce que les grands groupes regorgent de cash : les entreprises américaines (hors secteur financier) affichaient une trésorerie cumulée de près de 1.800 milliards de dollars au deuxième trimestre, selon la Réserve fédérale. Les actifs gérés par les investisseurs activistes s\'élèvent à 84 milliards de dollarsUn record historique qui, pour les investisseurs activistes, témoigne d\'une mauvaise gestion de leur trésorerie par les entreprises. Que ces dernières jugent la reprise économique encore trop fragile pour financer des acquisitions, passe encore, mais qu\'elles n\'utilisent pas leurs montagnes de cash pour mieux rémunérer leurs actionnaires, en augmentant les dividendes et en rachetant leurs propres actions, cela, les actionnaires activistes ne peuvent l\'admettre. C\'est tout le sens du combat mené par Carl Icahn chez Apple.Ensuite, les fonds activistes se sentent pousser des ailes car ils sont plus écoutés que dans le passé par les fonds de pension et autres grands investisseurs institutionnels. En témoigne le soutien apporté par Franklin Mutual Advisers à Carl Icahn dans le dossier Dell, voici quelques mois.Il faut dire que, dans l\'environnement actuel de taux très bas, ces \"zinzins\" ne savent plus où se tourner pour obtenir des rendements décents. Ce qui les rend beaucoup plus sensibles à la cause des investisseurs activistes, dont le but est d\'influer rapidement sur la stratégie d\'une entreprise afin de faire grimper sa valorisation boursière.Les fonds activistes génèrent des rendements de l\'ordre de 13%, en moyenne Enfin, si les fonds activistes se montrent aussi remuants aujourd\'hui, c\'est parce qu\'ils ont amassé beaucoup d\'argent, ces dernières années. Le montant de leurs actifs gérés s\'élève à 84 milliards de dollars, un montant qui a plus que doublé en quatre ans, selon le cabinet HFR (Hedge Fund Research).D\'une part, les \"zinzins\" sont à ce point séduits par les investisseurs activistes qu\'ils leur ont apporté quelque 4,7 milliards de dollars, cette année, un montant jamais atteint depuis 2006, selon HFR. D\'autre part, la fortune des activistes résulte également de leurs rendements, qui tournent en moyenne autour de 13% sur la période 2009-2012, toujours d\'après HFR.2.000 campagnes d\'activistes étudiéesComme quoi, en dépit de mésaventures comme la perte de près de 500 millions de dollars récemment essuyée par Bill Ackman dans le cadre de son combat pour modifier la stratégie du distributeur JC Penney, l\'activisme, ça fonctionne.Et pas seulement pour les fonds : les sociétés qui se sont trouvées aux prises avec un actionnaire activiste, et qui ont accédé à ses requêtes, ont comblé en cinq ans les deux tiers du retard qu\'elles accusaient sur leurs concurrents, en matière de rentabilité économique (return on assets), d\'après un rapport publié cet été par Lucian Bebchuck, un professeur de l\'université de Harvard (Etats-Unis) qui a étudié 2.000 campagnes d\'activistes, de 1994 à 2007. Alors, messieurs les chefs d\'entreprise, à qui le tour de dîner avec un investisseur activiste ?
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