Les revendications salariales reviennent sur le devant de la scène

Des routiers bloquant des plates-formes de la grande distribution à dix jours de Noël pour obtenir des augmentations de salaire. Pour le gouvernement, l'image aurait été du plus mauvais effet. Hier, 24 heures à peine après l'appel à la grève lancé pour le 13 décembre, Dominique Bussereau, secrétaire d'état aux Transports, a donc annoncé qu'il recevrait patronat et syndicats du secteur pour trouver un compromis. Mais le mouvement risque fort de faire tache d'huile sur fond de polémiques à répétition sur la rémunération des dirigeants. Déjà, les salariés des banques ont fait connaître leur mécontentement face à des propositions d'augmentations qui leur paraissent bien maigres. Dans la restauration, une majorité de syndicats estime encore insuffisantes les compensations liées à la baisse de la TVA.Au moment où les entreprises se plongent dans les « négociations annuelles obligatoires [NAO] », les revendications salariales risquent de faire un retour remarqué sur le devant de la scène sociale. Paradoxal, alors que le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 25 % en un an et que le taux de chômage du troisième trimestre dévoilé ce matin par l'Insee risque de flirter avec les 10 %?? Pas vraiment, selon Antoine Richard, directeur de projets et spécialiste des rémunérations chez Entreprise & Personnel?: « Le chômage touche principalement les précaires, les intérimaires ou les jeunes qui arrivent sur le marché de l'emploi. Les salariés qui sont en veille sur l'évolution des rémunérations sont, eux, souvent dans les grandes entreprises, plus à l'abri du risque de chômage. »Or, plusieurs facteurs sont susceptibles d'alimenter la grogne salariale. Selon les premières enquêtes disponibles, les budgets moyens d'augmentation prévus par les entreprises devraient osciller entre 2 % et 2,5 % de la masse salariale. Un taux non négligeable, compte tenu du niveau très bas, voire nul, de l'inflation, mais qui, au premier coup d'?il, apparaît comme très en deçà des 3 % accordés au cours des années précédentes. « En termes réels, il n'y a pas énormément de différence. Mais, en termes d'affichage, les budgets sont moindres », reprend Antoine Richard.Surtout, derrière ces budgets moyens, se cachent d'importantes disparités. Selon la Cegos, 46 % des DRH craignent d'être contraints à un blocage des rémunérations en 2010. Or, le message sur le « gel des salaires » sera d'autant plus délicat à faire passer que, depuis la rentrée, le moindre signal de reprise de l'activité économique donne lieu à moult commentaires sur la « fin de la crise ».En outre, nombreux sont les salariés à avoir déjà connu une année 2009 noire sur le terrain des rémunérations. Ainsi, les ouvriers de l'industrie, très touchés par le chômage partiel, ont perdu une partie de leurs revenus, même si l'allocation versée a été revalorisée au fil des mois. Les cadres ? surtout les commerciaux ? ont vu fondre leur part variable faute d'atteindre des objectifs fixés en période de pleine activité. Enfin, la quasi-totalité des salariés seront pénalisés sur les « à-côtés » du salaire. « Ils ont souvent moins d'intéressement, moins de participation. Et, en raison de la baisse des marchés, ils subissent un effondrement de leur capital détenu par l'entreprise, via leur plan d'épargne entreprise ou leur Perco », souligne Antoine Richard.Dans ce contexte, les entreprises vont être soumises à une forte pression. Surtout si tout ou partie des organisations syndicales décide de rappeler au chef de l'État son ambition d'être le « président du pouvoir d'achat ».
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