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10 questions sur la taxe carboneDirecteur de Toulouse School of Economics (TSE)Quel est le bon taux de taxation pour réduire les émissions de CO2 ? Les économistes travaillent depuis une dizaine d'années sur la valeur du carbone. Ce qu'il faut retenir, c'est que, réduire les émissions de CO2, ça a des coûts et des bénéfices. Les coûts : dans notre société où on utilise la voiture, où on se chauffe, où on a tant d'autres activités polluantes, la réduction aura un fort impact en termes de bien-être. Le bénéfice, lui, est écologique. La question est de savoir de combien une tonne de CO2 supplémentaire va augmenter les dommages qui seront supportés par les générations futures. C'est une question délicate dans laquelle les climatologues, les écologues et d'autres sciences dures ont un rôle à jouer pour déterminer de combien la concentration de CO2 va accroître la température moyenne de la terre, et ensuite, quels dommages ce réchauffement va infliger aux générations futures. Ce sont des calculs très compliqués. Les résultats qui ont été obtenus par les travaux de mon collègue Nordhaus de Yale et aussi par ceux de Nicholas Stern de la London School of Economics, l'auteur du rapport Stern, sont qu'une tonne de CO2 en plus dans l'atmosphère va générer des dommages entre 6 euros la tonne selon Nordhaus, et 60 euros la tonne selon Stern.Entre 6 et 60 euros, la marge d'erreur est large !Ce n'est pas une marge d'erreur, c'est une marge d'incertitude. Les économistes sont en désaccord entre eux pour déterminer l'intensité de la relation entre l'augmentation de la température de la Terre et les dommages. En outre, ces dommages vont se produire dans un siècle ou deux et la question est de savoir comment tenir compte de ces dommages très éloignés dans le temps pour une évaluation socio-économique aujourd'hui. Tout dépend du taux d'actualisation que les économistes utilisent pour faire ces calculs. Face à ces incertitudes, une autre solution consiste à se fixer un objectif de réduction des émissions de CO2. Supposons qu'on ne veuille pas dépasser un seuil de 550 parts par million (ppm) de CO2 dans l'atmosphère, il faudrait que les pays réduisent de trois quarts leurs émissions de CO2 d'ici à cinquante ans. Si on a cet objectif, quel prix faut-il accorder au carbone, quelle valeur faut-il imposer aux ménages et aux industriels de manière que, confrontés à ce signal prix, ils réduisent suffisamment leurs émissions de CO2 ? Les modèles qui ont été utilisés par la commission Quinet, qui était le précurseur de la commission Rocard [nommée par le gouvernement français pour proposer les modalités de la taxe carbone], ont abouti à la conclusion que pour atteindre cet objectif de réduction de trois quarts, il faut mettre aujourd'hui un prix de 32 euros la tonne de CO2 pour ensuite le faire monter en 2030 et en 2050 à 100 et puis 200 euros.Comment en est-on arrivé au prix de 17 euros du projet gouvernemental ?La commission Rocard avait opté pour 32 euros la tonne de CO2, et finalement, la décision a été prise au niveau politique de choisir 17 euros. Comme nous sommes actuellement les seuls à imposer une taxe carbone pour le consommateur final, il n'y a pas de raison de mettre une taxe aussi élevée que 32 euros. En attendant que les autres pays nous suivent, une taxe à 17 euros fait sens en termes d'acceptabilité sociale. Propos recueillis par Sophie Gherardi Aujourd'hui : Christian Gollier 
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