La génération Obama s'accroche à ses rêves

Waow ! Cela fait déjà un an, je n'ai vraiment pas vu le temps passer. » Ashley Put­nam, 25 ans, n'en revient pas. Barack Obama, le candidat dont elle a intégré l'équipe de campagne en Pennsylvanie en 2008, fête aujourd'hui le premier anniversaire de son élection. Mais cette diplômée en anthropologie de la prestigieuse université de Columbia est surtout étonnée d'avoir, depuis, trouvé du travail. « Je me sens privilégiée », avoue-t-elle, alors que tant de ses camarades d'université n'ont soit toujours pas décroché leur premier job, soit l'ont perdu. « J'ai obtenu mon diplôme en 2006, à une époque où les chasseurs de tête des grandes entreprises écumaient encore les Ivy Leagues [les huit universités les plus renommées du nord-est des États-Unis, Ndlr]. Nous n'étions pas du tout préparés à une telle situation économique », admet la jeune diplômée. Depuis plusieurs mois, Ashley travaille pour America Works, une agence de placement qui aide des New-Yorkais démunis (résidents de foyers sociaux, jeunes sans famille, anciens détenus?) à trouver du travail. Jour après jour, ils sont de plus en plus nombreux à faire la queue au 16e étage d'un discret immeuble de la 45e Rue, dans l'est de Manhattan. « Depuis deux mois, c'est vraiment la folie, nous accueillons de plus en plus de chômeurs et leur trouvons de moins en moins de travail », constate Lee Bowes, la directrice générale de l'agence. « D'ordinaire, nous réussissons à placer au moins 75 % de nos protégés mais le chiffre est récemment tombé à 50 % et ce, malgré les subventions versées aux entreprises pour qu'elles embauchent », se lamente la responsable.Sa société accueille un nombre croissant de diplômés et a même récemment aidé le titulaire d'un MBA à se recycler dans la vente de costumes ! « La Maison-Blanche reste les bras croisés pendant que le chômage des jeunes explose. Les crédits d'impôt proposés aux employeurs ne stimulant pas l'emploi, Obama devrait s'inspirer de l'État de New York qui verse jusqu'à six mois de salaire aux sociétés pour aider les gens à trouver du travail », fulmine cette progressiste, en première ligne sur le front du chômage des jeunes. « Comment voulez-vous qu'un jeune démuni trouve un poste quand les diplômés d'université en sont réduits à vendre des vêtements dans un Gap en attendant de trouver une situation qui convienne réellement à leurs compétences ? » s'interroge Lee Bowes. Le 4 novembre 2008, la jeunesse américaine a plébiscité le candidat démocrate : 66 % des 18-29 ans lui avaient alors accordé leur vote contre 32 % pour son adversaire républicain, John McCain. Un an plus tard, ces électeurs enthousiastes sont les premières victimes de la crise de l'emploi. Alors que le taux de chômage s'inscrit à 9,8 % aux États-Unis, le dernier rapport du Bureau sur les statistiques du travail (BLS) note que 18,5 % des 16-24 ans se trouvaient au chômage en juillet dernier, du jamais-vu depuis 1948 pour cette période de l'année généralement porteuse en « jobs » d'été et autres stages.En dépit des critiques qui lui sont adressées, l'administration Obama n'a pas ménagé son effort. Elle a spécifiquement consacré 1,2 milliard de dollars de son plan de relance à l'emploi des 14-24 ans, dépensés, pour l'essentiel, en subventions à l'embauche destinées aux sociétés et aux administrations durant la période estivale. « Sans le plan de relance, nous aurions vécu un vrai désastre, mais pour soutenir l'emploi des jeunes, le gouvernement doit adopter de nouvelles mesures », plaide Heidi Shierholz, spécialiste du marché du travail auprès de l'Economic Policy Institute, un centre de recherche proche des milieux syndicaux. « N'oubliez pas que pendant une récession, les jeunes sont les premiers à être licenciés tandis que leurs aînés s'accrochent à leur poste », remarque l'économiste. Et compte tenu du coût élevé des études supérieures, il est difficile de fuir le chômage en rejoignant l'université : les frais de scolarité dans les collèges privés ont en moyenne grimpé de 4 % à 26.300 dollars cette année et 5 % d'étudiants en moins étaient attendus sur les bans des facultés à la rentrée. Malgré l'incapacité du gouvernement américain à endiguer le chômage de masse, l'hôte­ de la Maison-Blanche reste particulièrement populaire auprès des jeunes. Selon un récent sondage Gallup, 60 % des 18-32 ans approuvent toujours l'action du président, contre 52 % pour l'ensemble de la population, un soutien qui s'érode toutefois à vive allure, puisque ces jeunes adultes étaient 71 % à soutenir son action à la fin juillet. « De manière générale, les jeunes ont tendance à soutenir les idées progressistes du président. Depuis son élection, ils ne prêtent plus vraiment attention à l'irresponsabilité de sa politique, notamment à l'international et à sa main dangereusement tendue à l'Iran », déplore David Laska, 22 ans, président de l'association des républicains de l'université de New York (NYU). Ces jeunes, comme leurs aînés, imputent en majorité les problèmes économiques de leur pays aux politiques de l'ancien locataire de la Maison-Blanche, George W. Bush, selon un récent sondage Zogby.« Contrairement à ce qu'affirment les médias conservateurs, je pense qu'un an après son élection, la jeunesse américaine demeure inspirée par Barack Obama. Nous n'avons jamais autant recruté d'adhérents qu'en 2009 », s'enorgueillit Matthew Silverstein, le président des jeunes démocrates de l'État de New York. En dehors des questions de société comme le mariage homosexuel, ce militant âgé de 27 ans estime que son candidat n'a pas démérité au cours de sa première année de présidence. Directeur des campagnes de l'Energy Action Coalition, qui fédère cinquante associations regroupant un demi-million de jeunes décidés à lutter contre le réchauffement climatique, Peter Griffin assure aussi que la base reste très motivée. « Après huit années d'inertie, les projets de loi sur le climat avancent enfin au Congrès », remarque l'activiste. « Bien sûr, certains de nos membres déplorent la lenteur du processus parlementaire quand d'autres se félicitent de chaque progrès réalisé au Capitole », note Griffin. En dépit des bons points qu'elle attribue à Obama, la coalition lancera à l'occasion du premier anniversaire de son élection une campagne qui, cette fois-ci, aura vocation à dynamiser le président. Au lieu de confier l'avenir de ce dossier crucial aux parlementaires, « Barack Obama doit s'engager personnellement dans le débat climatique et faire en sorte que les États-Unis fassent preuve de leadership », affirme Peter Griffin. « Les jeunes restent totalement engagés sur les thèmes clés qui les ont poussés à voter pour Obama que ce soit le climat ou la sant頻, constate Chrissie Faessen, la porte-parole de l'association Rock The Vote, célèbre aux États-Unis pour ses campagnes de soutien à la participation électorale et à l'engagement politique des jeunes. Pour autant, Rock The Vote multiplie les forums afin de mobiliser ces électeurs autour du débat sur la couverture maladie, dont ils ont été jusqu'ici quasi absents, tandis que l'opposition républicaine s'est fait clairement entendre. Dix millions d'Américains âgés entre 19 et 29 ans ne disposent pourtant pas d'assurance-maladie. À 22 ans, Krisja Hendricks a découvert qu'elle était atteinte d'un cancer de la thyroïde. « Trois mois après avoir obtenu mon diplôme universitaire, l'assurance de mon père a cessé de me couvrir et je n'ai pu en souscrire une autre car j'avais une maladie préexistante », explique cette survivante de 28 ans. Elle milite désormais avec Rock The Vote pour que le Congrès adopte l'une des promesses de Barack Obama : permettre aux jeunes adultes de bénéficier de l'assurance de leurs parents jusqu'à l'âge de 26 ans. Aux États-Unis, les politologues s'interrogent désormais sur la participation des jeunes lors des élections de mi-mandat de novembre 2010, à l'occasion desquelles les 435 sièges de la Chambre des représentants et 36 sièges du Sénat seront renouvelés. « C'est une question totalement ouverte », note Robert Weiner, ancien chargé du recrutement électoral du Parti démocrate. « C'est sûr qu'il va y avoir du boulot », admet Chrissie Faessen, chez Rock The Vote. « Une fois adoptée la réforme de la santé, il s'agira de notre priorit頻, prévient la responsable qui dit toutefois avoir confiance dans « l'intelligence » de la jeunesse américaine. n66 % des électeurs américains de moins de 30 ans ont voté pour Obama en 2008.Selon un récent sondage Gallup, 60 % des 18-32 ans approuvent toujours son action.« Depuis deux mois, c'est vraiment la folie, nous accueillons de plus en plus de chômeurs et leur trouvons de moins en moins de travail. »
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