La diplomatie économique au secours du made in France ?

En annonçant le 3 juillet dernier dans son discours de politique générale qu\'une «véritable diplomatie économique sera bientôt mise en place pour améliorer la compétitivité externe de la France», Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre a donné le coup d\'envoi d\'une petite révolution de palais au sein du petit monde des ambassades. Cette révolution est fortement souhaitée par Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, n\'en déplaise à Bercy qui souhaitait garder la main sur cette question.S\'agit-il de transformer les représentants de l\'Etat en VIP? Ce n\'est pas si simple. «Le monde change, notre diplomatie doit également évoluer si la France veut conserver son influence politique et économique à travers le monde», explique Pierre-Antoine Gailly, le président de la Chambre de commerce et d\'industrie de Paris (CCIP) qui dévoile en exclusivité à La Tribune les conclusions d\'une étude intitulée «Développement international des entreprises : quel apport de la diplomatie?» réalisée par ses services et qui formule une série de propositions pour que cette nouvelle diplomatie soit rapidement opérationnelle.Des considérations à prendre en compteDes propositions qui reposent sur une série de considérations. «L\'ambassadeur jouant un rôle naturel de catalyseur et de coordinateur de l\'action publique, la diplomatie économique mérite d\'être inscrite parmi les priorités de sa feuille de route. La cohérence d\'ensemble d\'un dispositif de diplomatie économique doit être assurée au niveau national et ne pas être altérée par l\'intervention d\'autres niveaux comme les Régions. La diplomatie économique doit servir un double objectif: tant le développement international des entreprises françaises que l\'accroissement des investissements étrangers en France», avance l\'étude.Autres considérations formulées par la CCIP: «Une diplomatie économique digne de ce nom ne saurait se concevoir sans un système d\'information performant; l\'État se doit d\'apporter les informations stratégiques -à mi-chemin entre étude de marché et intelligence économique- nécessaires aux entreprises en mettant en place des systèmes de veille plus poussés afin de générer l\'intérêt des entreprises. Les missions régaliennes de la diplomatie économique et la mission commerciale dite d\'accompagnement des entreprises, notamment des PME, doivent relever d\'acteurs distincts», poursuit le texte qui insiste aussi sur la nécessité d\'\'inscrire cette nouvelle diplomatie dans une logique de résultat et qui plaide pour une meilleure coordination et une lisibilté améliorée de l\'accompagnement public à l\'export.Qu\'en pensent les Français?Concrètement, la diplomatie française doit être bien plus pragmatique. «La France est souvent pénalisée, au plan économique par son approche politique des relations économiques internationales alors que d\'autres pays prennent traditionnellement des engagements diplomatiques et politiques internationaux sans que leur diplomatie économique n\'en soit affectée. Il faut mettre en oeuvre une diplomatie économique renouvelée qui puisse s\'affranchir de la diplomatie tout court. Elle doit s\'autonomiser par rapport à la diplomatie politique française qui poursuit d\'autres objectifs», explique Pierre-Antoine Gailly, citant le cas de l\'Allemagne dont la diplomatie économique serait particulièrement au point.La diplomatie française peut-elle se transformer ainsi? Ce n\'est pas si évident. Relayée par la presse, l\'opinion publique ne risque-t-elle pas de s\'émouvoir si une entreprise tricolore ayant reçu le soutien de l\'Etat remporte un succès commercial en Chine ou au Vénézuéla? «La question du respect des droits de l\'homme dans ces pays serait immédiatement débattue. En Allemagne, on se contenterait de saluer cette performance», estime Pierre-Antoine Gailly qui souhaite que l\'Europe soit plus unie à l\'Organisation mondiale du Commerce pour défendre les intérêts des entreprises européennes, notamment sur la question de la réciprocité.Une diplomatie utile aussi en Europe«Toutefois, ce sujet est aussi européen. Il y a des dossiers urgents à régler dans le domaine non-tarifaire au sein même de l\'Europe que seul l\'Etat français peut faire avancer à Bruxelles. On peut citer l\'harmonisation de certaines normes. Parce que celles-ci ne sont pas les mêmes en Allemagne et en France dans le domaine électrique, les entreprises françaises du secteur ont les pires difficlutés à s\'imposer outre-Rhin. En revanche, leurs concurrentes allemandes ont un accès totalement libre au marché français. Autre sujet délicat sur lequel les entreprises n\'ont pas de prise: la simplification du code des marchés publics. Il faut améliorer l\'accès des entreprises françaises aux marchés européens si on veut leur permettre d\'augmenter leur chiffre d\'affaires et leur permettre ainsi de grandir», suggère Pierre-Antoine Gailly.Enfin, la diplomatie économique ne doit pas se résumer à la participation de quelques chefs d\'entreprises à des voyages officiels de l\'Elysée ou de ministres de Bercy. «Quand Angela Merkel, la chancelière allemande se déplace en Chine avec les plus beaux fleurons de son économie, elle y reste trois jours. Les autorités locales sont très sensibles à ces démonstrations d\'amitié qui s\'avèrent payantes dans le domaine commercial. Nous devons prendre exemple», martèle l\'élu.
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