Novelli et le soldat PS inconnu

La région Centre est plus vaste que la Belgique, avec ses 39.151 km2 étirés sur six départements : Eure-et-Loir, Loiret, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Indre et Cher. À l'ombre de sa puissante voisine, la région capitale, s'y joue une bataille tout aussi âpre que celle qui oppose Jean-Paul Huchon à Valérie Pécresse. Car aux yeux des stratèges de la majorité, le Centre pourrait bien être l'écueil sur la route du « grand chelem » socialiste aux élections régionales des 14 et 21 mars. Et donc faire trébucher la première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, en quête de respectabilité élyséenne.À la tête des troupes de l'UMP, le secrétaire d'État aux PME, Hervé Novelli, tente de bousculer le président socialiste sortant, François Bonneau, qui a été affublé de surnoms aussi flatteurs que « Mister Nobody » ou « Monsieur 7 % », allusions à son faible taux de notoriété.Mercredi matin, dans un café qui fait face à la cathédrale Sainte-Croix d'Orléans, Hervé Novelli affiche une foi à toute épreuve. Même confronté à un sondage Ifop publié le jour même dans « La République du Centre » et qui prédit la victoire confortable des listes Bonneau au second tour des régionales.Dans tous les cas de figure, qu'il s'agisse d'un duel avec Hervé Novelli (54 %-46 % au second tour) ou d'une triangulaire avec le Front national (48 % pour la liste de gauche contre 42 % pour celle de droite). « Ma détermination est entière. Je suis convaincu, et j'en prends le pari, que le score du second tour sera très serr頻, réplique le secrétaire d'État.Hervé Novelli préfère s'arrêter au pronostic du premier tour. Sa liste est créditée de 31 % d'intentions de vote, devant celle de son adversaire socialiste, qui obtiendrait 24 % des voix, « soit moins que la moyenne nationale que les instituts de sondage accordent au PS ». « Il n'y a pas de dynamique de la part du Parti socialiste en région Centre », veut croire le secrétaire d'État, qui fait de plus le pari de la division de la gauche et de ses alliés au second tour. « Il y aura composition des listes dans la douleur », affirme-t-il en soulignant les divergences entre socialistes et écologistes sur les transports ou le nucléaire, les tensions entre Modem et Front de gauche. Et, comme le soleil perce sur le portail gothique de la cathédrale, Hervé Novelli assure que François Bonneau, « mauvais alchimiste », va « transformer l'or en plomb ».Mais le secrétaire d'État aux PME reconnaît aussi que la malédiction de la mi-mandat de Nicolas Sarkozy pèse bel et bien sur le scrutin des 14 et 21 mars. La menace d'un vote sanction contre le gouvernement, dont huit membres sont candidats à des présidences d'exécutifs régionaux, est réelle. « Est-ce que le contexte national va déterminer la réponse des électeurs ? C'est mon défi et c'est le pari du Parti socialiste, qui veut le rejet plutôt que le projet », estime Hervé Novelli, qui se dit « fier » d'appartenir au gouvernement de François Fillon et juge que son bilan de secrétaire d'État n'est pas jugé « si négativement que cela », en dépit notamment des frictions suscitées chez les artisans et les commerçants par sa réforme de l'auto-entrepreneur.« Si la question est de sanctionner les sortants, eh bien, les sortants sont à Orléans, pas à Paris », ajoute le secrétaire d'État en déclinant les « faiblesses » et la « légèret頻 socialistes qui font qu'à ses yeux la région Centre est « à la traîne » après douze ans de gestion PS.Samedi soir, sur le parvis de l'hôtel de ville de Chartres, les premières bourrasques de la tempête Xynthia ne déstabilisent pas plus François Bonneau que l'offensive d'ampleur déclenchée sur ses terres par l'UMP. Nicolas Sarkozy est venu soutenir Hervé Novelli dans le Loir-et-Cher début février. Et François Fillon sera aux côtés de son secrétaire d'État le 16 mars à Orléans.Le président de région sortant aligne lui aussi ses soutiens. Martine Aubry le rejoindra à Orléans pour un meeting le 10 mars. À Chartres, c'est François Hollande qui a fait le détour en revenant de Corrèze. À la tribune, l'ancien premier secrétaire du PS plaisante sur le quasi-anonymat de François Bonneau : « C'est bien, il ne peut que progresser, gagner... Et d'ailleurs, le 21 mars, plus de 51 % des habitants de la région non seulement le connaîtront mais auront voté pour lui pour la première fois ! »François Bonneau a en effet succédé en 2007 à Michel Sapin, président élu en 2004 mais qui a quitté l'hôtel de région pour l'Assemblée nationale.Dans cette campagne, cet enseignant de 56 ans, proche du maire de Tours, Jean Germain, se dit « serein et détermin頻. Pour François Bonneau, le gouvernement et Nicolas Sarkozy « font aujourd'hui l'objet d'un rejet », qu'il dit sentir au-delà des enjeux locaux. « Et en plus, ils envoient, ici, en région Centre, le plus libéral des libéraux ! » lance-t-il à propos de son adversaire, dont il juge la campagne « très excessive, agressive ».Ces derniers jours, François Bonneau et Hervé Novelli se sont affrontés sur la création d'un Pres (pôle de recherche et d'enseignement supérieur) unissant les universités de Tours et d'Orléans. Le secrétaire d'État n'a pas apprécié que le président de région organise, la semaine dernière, une conférence de presse, en l'absence de la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, « alors que la création des Pres est une prérogative de l'État ». « Polémique ridicule », réplique François Bonneau.Pour cette élection désormais suivie à la loupe par les états-majors parisiens, UMP et PS affichent des programmes aux thématiques similaires : emploi, développement durable, logement, santé, transports. Le taux de chômage est ici de 8,2 %, ce qui classe la région Centre au dix-huitième rang parmi les vingt-deux collectivités territoriales métropolitaines. Les candidats s'affrontent notamment sur le rôle des associations. Pour Hervé Novelli, la région doit financer des prestations dont elle pourra vérifier la qualité au lieu de verser directement des subventions aux associations. Pour François Bonneau, « le tissu associatif est vital en période de crise » et permet d'en amortir les effets, notamment en matière de chômage. Un bon vieux débat droite-gauche. Comme un galop d'essai pour de futures échéances électorales. Par Hélène Fontanaud.
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