Comment expliquez-vous qu'aucun film n'ait été spécifiquement réalisé sur la rafle du Vel'd'Hiv' ?Je crois que nous avons eu en France un malaise et un fort sentiment de culpabilité qui s'est, là encore, traduit par une amnésie collective. De Gaulle n'a pas puni les véritables responsables. Or, quand on ne désigne pas les coupables au peuple, il n'a pas les moyens de relever la tête. Même Oberg et Knochen, responsables de la déportation de 75.000 juifs, ont été graciés après huit ans de prison. Avec ce film, je veux aussi que les Parisiens sachent qu'ils ont collectivement sauvé 11.000 juifs ce jour-là. Mais j'ai aussi fait « la Rafle » parce que l'enfant dont je parle, qui avait 10 ans à l'époque, en a 80 aujourd'hui. Nous sommes en train de basculer de la mémoire à l'histoire. Vous avez réalisé un important travail de documentation pour ce film.J'ai travaillé sur un tas de documents, parfois recueillis sur Internet. Pour les détails plus historiques, j'ai demandé conseil à Klarsfeld, dont les archives m'ont permis de reconstituer les scènes politiques du film. Il y a toujours ce débat pour savoir si on peut faire un spectacle avec l'Histoire. « Shoah », de Claude Lanzmann, est un documentaire admirable. Mais « Schindler's List » a révélé à 300 millions d'Américains ce qu'était l'Holocauste. Partant de vos recherches, comment avez-vous élaboré votre scénario ?D'abord, j'ai identifié les personnages que j'allais faire revivre. Comme Annette Monod, l'assistante sociale infirmière qui s'est retrouvée au Vel'd'Hiv', puis à Beaune-La-Rolande puis au Lutetia. Après, j'ai fait en sorte qu'ils se connaissent. Puis j'ai recréé des vies de famille. C'est une espèce de tissage avec des fils de mille couleurs. Mais il était pour moi hors de question de se vautrer dans le malheur.Propos recueillis par Yasmine You

latribune.fr

04 Mars 2010, 23:21

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