Le lent combat contre la fraude fiscale internationale

« Les paradis fiscaux ? Je les ai supprimés ». Ainsi parlait Nicolas Sarkozy, après avoir, il est vrai, contribué à la relance, en 2009, de la lutte contre la fraude fiscale internationale. Qu\'en est-il réellement ? Les révélations du consortium « OffshoreLeaks », qui mettent en exergue les sommes astronomiques placées dans les paradis fiscaux peuvent donner à penser que rien n\'a été fait, contrairement à ce qu\'avait affirmé l\'ex chef de l\'Etat. La vérité se situe sans doute entre les deux.Aujourd\'hui, les grands Etats veulent vraiment combattre la fraude fiscale. Ne serait-ce que pour faire rentrer des impôts. « Les pays européens, les Etat-Unis, mais aussi des pays comme le Brésil, l\'Inde sont dans cette démarche, » souligne François d\'Aubert, secrétaire du Peer Review Group du Forum mondial sur la transparence et l\'échange de renseignements, lié à l\'OCDE.Un premier pas insuffisantConcrètement, quels sont les progrès réalisés contre les fraudeurs ? Premier progrès, sous la pression internationale, l\'immense majorité des pays (110 environ) a adhéré au Forum Mondial sur la transparence. C\'est un premier pas, évidemment insuffisant, mais qui dénote au moins l\'affichage, de la part de ces nations, d\'une volonté de progresser. Deuxième acquis : tous les pays membres du forum s\'engagent, d\'une part, à adapter leur législation interne pour lutter contre la fraude et, d\'autre part à échanger les informations avec les autres administrations fiscales. Ces deux engagements, le Forum mondial entend en vérifier la réalité. La phase 1 des enquêtes correspond à la modernisation des législations internes, la phase 2 à l\'échange de renseignements entre pays. Très curieusement, les petits paradis fiscaux des Caraïbes en sont déjà au deuxième stade, alors que ce n\'est pas encore le cas de plusieurs pays non négligeables, qui n\'ont même pas passé la phase 1. Ainsi, la Suisse, le Panama, le Liban, les Emirats arabes unis (Dubaï), l\'Arabie Saoudite, le Libéria... n\'ont toujours pas adapté leur législation interne pour la mettre aux normes OCDE.En revanche, tous les autres pays membres du forum l\'ont fait, et l\'OCDE enquête sur la respect des échanges de renseignement.L\'échange automatique de renseignements, un progrès à venirSurtout, l\'organisation a franchi un pas important en juin 2012, en préconisant l\'échange automatique, qui pourrait progressivement devenir la norme : alors qu\'aujourd\'hui, pour obtenir des renseignements sur un contribuable auprès d\'un paradis fiscal,  le fisc français, par exemple, doit déjà présenter un dossier concernant le contribuable soupçonné de fraude, l\'échange automatique lui permettrait de connaître le nom et la situation de la totalité des Français ayant un compte.... aux îles Caïman, par exemple. Rien de plus facile, alors, que de vérifier si tel ou tel ministre ou toute autre personnalité, possède un compte.L\'échange automatique n\'est pas encore généralisé, loin de là. Mais cette procédure pourrait se généraliser. Les Américains ont montré l\'exemple, avec leur loi Fatca, particulièrement rigoureuse : les banques du monde entier doivent transmettre toutes les informations concernant des citoyens américains, sous peine de... perdre leur licence aux Etats-Unis.Une question de réelle volonté politiqueBien sûr, la question subsiste des prête-noms : quand c\'est une société, elle-même possédée par un trust situé dans un autre pays, qui possède un compte bien fourni, comment connaître l\'identité des ayant droit, des propriétaires réels? En théorie, avec la mécanique actuelle de l\'échange d\'information, il est possible de remonter toute la chaîne, les administrations doivent dire qui est derrière la société enregistrée dans leur pays. Mais plus la chaîne est longue et complexe, plus il sera difficile d\'obtenir l\'information cruciale, l\'identité du contribuable qui a fraudé le fisc de son pays. Et ensuite, toute la question est celle de la volonté politique réelle... ou non de lutter contre les fraudeurs. Bref, dire que les paradis fiscaux ont été supprimés est... un peu hasardeux. Mais affirmer que rien n\'est fait pour diminuer les possibilités de fraude fiscale internationale n\'est pas exact. 
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