L'euro victime des doutes sur la stratégie de la BCE

Le plan de sauvetage de la Grèce, doublé de la contribution inédite de la Banque centrale européenne qui a suspendu le seuil d'éligibilité des titres helléniques à ses opérations de refinancement, n'a pas suffi à laisser longtemps les vendeurs d'euros sur la touche. Ils sont sortis de leur réserve mardi, faisant tomber la monnaie unique à un nouveau plancher de douze mois. Certains commencent à mettre en doute la crédibilité de la BCE, la gardienne de l'euro, contrainte à une palinodie unique dans son histoire. Car, en janvier, Jean-Claude Trichet avait affirmé catégoriquement?: « Nous ne changerons pas notre système de collatéraux pour le bien d'un pays particulier?; cela est clair comme de l'eau de roche. » Dans un éditorial au vitriol, le quotidien populaire allemand « Die Welt » épingle le président de la BCE estimant qu'il « a prouvé au monde entier que ses paroles ne valent rien en temps de crise grave ». La plupart des observateurs sont plus cléments, jugeant que la BCE a fait preuve de souplesse et de pragmatisme. Mais ils redoutent qu'une fois franchi le pas pour la Grèce, elle ne soit obligée d'avoir à faire de nouvelles exceptions pour d'autres pays s'ils s'enfoncent dans la crise, à commencer par le Portugal et l'Espagne, le fauteur de troubles de mardi, dont le poids économique est autrement plus important.Résultat?: l'euro a cassé le seuil de 1,31 sur lequel il était venu buter la semaine dernière, dérivant jusqu'à 1,3020 dollar, soit une décote de 11 % depuis le début de l'année et de 16 % par rapport à son pic de 2009, atteint fin novembre. Certains diagnostics commencent à faire froid dans le dos. À commencer par celui du prix Nobel d'économie, Joseph Stiglitz, qui a prédit mardi la fin possible de l'euro, si l'Europe ne parvient pas à régler ses « problèmes institutionnels fondamentaux ».Pour Steven Barrow, stratège de la Standard Bank à Londres, « le seul garde-fou à une chute de l'euro est le niveau déjà très élevé des positions courtes ». De fait, les positions vendeuses d'euros des fonds de couverture atteignaient le record absolu depuis la naissance de la monnaie unique de 89.013 contrats à la fin de la semaine dernière, selon les chiffres de la Commodity Futures Trading Commisssion, le régulateur américain des marchés à terme. Isabelle Croizard
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