Tel-Aviv, terre promise des start-up du village global

Transformer sa ville en une nouvelle Silicon Valley : tel est le rêve que Ron Huldai, le maire de Tel-Aviv, ne cesse de caresser. Le mirage a commencé à prendre forme. La ville « blanche », qui compte la plus forte concentration de bâtiments de style Bauhaus au monde, concentre déjà un tissu exceptionnel de 700 start-up à différents stades de développement, ainsi qu'un réseau de 1 200 entreprises spécialisées dans la haute-technologie, pour une population de 400 000 habitants. Start-up Genome, un site américain, a placé Tel-Aviv au deuxième rang des endroits les plus attractifs pour les jeunes pousses, juste derrière la Californie.Sortir des unités d'élite de l'arméeDans l'immense majorité des cas, ces entreprises ont été créées par de jeunes Israéliens sortis des unités d'élite de l'armée spécialisées dans la cyberguerre, la haute-technologie ou les services de renseignement. Le célèbre et très branché boulevard Rothschild, au centre-ville, est ainsi devenu « la rue des start-up, dans la ville des start-up d'une nation de start-up », proclame fièrement Avner Warner, le chef du département du Développement économique international de la municipalité.Mais, pour Ron Huldai, l'heure est désormais venue de passer la vitesse supérieure afin de créer un nouvel « écosystème ». « L'innovation constitue la priorité des priorités », explique le maire qui veut à tout prix attirer des créateurs d'entreprise étrangers, afin de donner à Tel-Aviv une aura internationale qui lui fait encore défaut. Dans la Silicon Valley, le modèle de référence, environ 50 % des fondateurs de start-up sont des étrangers, alors que le pourcentage reste jusqu'à présent négligeable en Israël.Sur le terrain législatif, les pressions du maire sur le gouvernement ont abouti à un projet de loi sur l'octroi de « visas pour start-up ». Objectif : lever les obstacles bureaucratiques afin de convaincre des entrepreneurs de déménager avec armes et bagages à Tel-Aviv pour y élire domicile, mais aussi pour ouvrir des bureaux et des centres de R&D. « Jusqu'à présent, il était difficile d'obtenir des visas pour nos ingénieurs », explique Leo Widrich, cofondateur du réseau social Buffet, établi à San Francisco et à Hongkong, qui a commencé à installer en avant-garde une demi-douzaine de ses employés à Tel-Aviv.Un réseau Wi-Fi globale couvrira toute la villeHistoire de bichonner l'image d'une ville hypermoderne fonctionnant à fond 24 heures sur 24, la municipalité va établir un réseau Wi-Fi global qui permettra de rester connecté partout, aussi bien dans les très nombreux bars, que sur la plage, au théâtre, au musée ou dans n'importe quel lieu public. Ron Huldai a lui-même donné l'exemple. Une bibliothèque peu fréquentée installée en haut d'une tour surnommée « Shalom » qui surplombe la Méditerranée a été transformée en espace de travail pour de jeunes informaticiens qui peuvent venir tester et partager de nouvelles idées et technologies dans un esprit de coopérative. Les loyers sont à bon marché pour ceux qui passent par cette pépinière avant que les plus chanceux et talentueux ne prennent leur essor et fondent à leur tour leur entreprise.Pour Ron Huldai, ce cyberespace fait penser à une sorte de « kibboutz du futur », une allusion à ces villages collectivistes qui, au siècle passé, ont permis l'émergence d'une agriculture ultra-moderne dans cet État vieux d'à peine 65 ans. D'ores et déjà, le terreau s'est avéré particulièrement fertile. Tel-Aviv rassemble les deux tiers des start-up actives en Israël, un pays en pôle position dans le monde pour le nombre de jeunes entreprises de haute technologie par tête d'habitant, avec un ratio de 4,7 % du PNB investis dans la R&D.Des grands groupes ont d'ores et déjà cédé aux charmes de la ville qui joue à fond sur son climat ensoleillé, son côté hédoniste et sa concentration d'ingénieurs. Google, Microsoft, SAP, Oracle, HP, Marvell ont installé leur centre de R&D dans la région de Tel-Aviv. Pour autant, la ville, tout comme Israël, est victime de son succès et souffre d'une « fuite des cerveaux ». Bon nombre de jeunes patrons, une fois franchi le stade de la start-up et le succès venant, ont tendance à déménager aux États-Unis, notamment en Californie, là où il faut se montrer pour prouver sa réussite. Waze Ltd, créatrice de l'application mobile de GPS du même nom, un des fleurons du high-tech local activement courtisé ces derniers temps par Google - qui serait prêt à mettre 1,3 milliard de dollars sur la table pour en prendre le contrôle -, a déménagé son siège et une partie de son personnel à Palo Alto. Autre exemple : BillGuard, une entreprise qui permet aux consommateurs d'identifier les frais indus prélevés sur leurs cartes de crédit a établi son siège social à New York tout en maintenant un bureau le long du boulevard Rothschild.La paix, une nécessité pour l'économie du paysReste à savoir si Ron Huldai réussira à freiner cette délocalisation et, surtout, à séduire des investisseurs étrangers. Une mission qui ne s'annonce pas facile. Le marché israélien est minuscule face au continent américain. Et puis le facteur risques « géostratégiques » peut peser lourdement sur les décisions des patrons, durant les périodes de tension militaire. Comme le souligne Stanley Fischer, le gouverneur sortant de la Banque d'Israël : « L'économie israélienne peut difficilement se passer de la paix. » Or, la région, avec la Syrie, le Liban, l'Égypte, la bande de Gaza et la menace nucléaire iranienne, n'a rien d'un havre de sérénité. Un sérieux handicap que Tel-Aviv, forte de ses succès passés, espère quand même surmonter...
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