La taxe bancaire doit préserver un jeu à armes égales entre les banques »

La taxe bancaire, maintes fois évoquée, revient en force. Barack Obama avait ouvert le feu en début d'année en exigeant des banques le remboursement intégral, sous forme de taxe, des sommes avancées lors du plan de sauvetage. « Money back ! » était alors le mot d'ordre d'une opinion déchaînée contre Wall Street. L'Allemagne est revenue à la charge, la semaine dernière, en la présence très médiatisée de Christine Lagarde, qui ne pouvait que s'associer à l'initiative. Avec toutefois un bémol : une taxe c'est bien, mais une taxe à l'échelle internationale, c'est mieux. En effet, si notre ministre de l'Économie juge important d'agir, avec un double objectif, « la prévention et la responsabilisation », elle précise aussitôt que le mécanisme doit « préserver un jeu à armes égales entre les banques ». Les Britanniques ont suivi, lundi, par la voix du Premier ministre Gordon Brown, et les Suisses devraient également se rallier à la cause.Cela tombe bien, le FMI s'apprête à publier, avec l'onction du G20, une recommandation dans ce sens. Enfin du concret ! Car jusqu'ici, juge François Morin, économiste, « les résultats du G20 en matière de régulation sont très décevants ». Pour Patrick Soulard, ancien banquier et enseignant à Paris-Dauphine, les gouvernements tentent surtout de répondre « à une forte attente des opinions publiques ». Sur l'efficacité de la mesure, en revanche, le scepticisme domine. Si Patrick Soulard peut concéder quelques arguments en faveur d'une taxe, comme le prix d'une régulation renforcée, il souligne aussitôt que son « montant apparaît dérisoire » en cas de nouvelle crise systémique.Mais, ce qui le frappe surtout, c'est le « manque de perspective » de cette mesure. Personne ne s'accorde vraiment sur le sens de cette taxe, encore moins sur ses modalités, alors même que les régulateurs planchent sur de nouvelles normes prudentielles qui s'annoncent plutôt musclées. Bref, questions et réponses s'entremêlent sans grande cohérence. Le consultant Mohammed Agoumi dénonce ainsi cette « double peine », alors que les exigences de fonds propres vont être sensiblement renforcées à un moment où l'économie aura besoin de financement bancaire pour repartir. « Une fois la croissance revenue, on pourra légiférer sur une taxe en prenant bien soin de ne pas créer de distorsions de concurrence. » Car, rappelle-t-il, « les banques ne sont pas homogènes ni dans leurs structures de bilan, ni dans leurs activités ». En clair, pénaliser les banques d'investissement, c'est avantager les banques de détail.Ce que ne verrait pas d'un mauvais oeil l'anthropologue Paul Jorion. Même si les deux experts s'accordent sur un point : la finance est une matière complexe que ne semblent pas maîtriser les politiques. « Les politiques ne comprennent rien de la finance et inversement », déplore Paul Jorion. Pour ce dernier, dans l'esprit de ce que proposait Adair Turner, le régulateur de la finance britannique, « il faut encourager les activités bancaires utiles pour l'économie, décourager les activités risquées de marché et interdire purement et simplement les activités nuisibles ». François Morin abonde dans son sens, en rappelant que c'est le fonctionnement des marchés financiers qui pose problème et non les banques elles-mêmes.Analyse Éric Benhamou Journaliste à « La Tribune »Chaque semaine, « La Tribune » décrypte une phrase ou une citation qui marque un temps fort de l'actualité politique, sociale ou économique.? l'intégralité des réactions de Paul jorion, Mohammed Agoumi, Patrick soulard et François Morin sur « La Tribune » numérique du samedi 3 avril 2010.
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