L'air du temps

En 1928, l'ingénieur Jean-Léon Reutter défie les lois de la physique en concevant un mouvement d'horloge fonctionnant pendant plusieurs siècles sans usure ni intervention extérieure. La pendule Atmos est née. Depuis, seules les lentes oscillations de son balancier annulaire et la ronde de ses aiguilles rappellent que l'heure continue de tourner... grâce aux seules variations de température. Le secret ? Une capsule hermétique contenant un mélange de gaz (à l'origine, du mercure) qui se dilate lorsque la température augmente, et se contracte lorsqu'elle baisse. Il y a deux ans, à l'occasion du 80e anniversaire de l'Atmos de Jaeger-LeCoultre, le designer australien Marc Newson (réputé, entre autres, pour ses chaises Embryo, Orgone Lounge ou Felt Chair) a eu carte blanche pour revisiter l'objet. Taillé dans un glaçon de cristal Baccarat, l'«Atmos 561 by Marc Newson » a su imposer ses courbes pures et contemporaines. Cette année, le trio gagnant persiste et signe, et dévoile, en série très limitée, deux nouvelles versions : l'une bleue (produite en 28 exemplaires), l'autre translucide (48 pièces disponibles). L'alliance, une nouvelle fois, de l'art contemporain et de l'artisanat, de la technique et de l'esthétique. La voûte céleste sous clocheLes heures et les minutes côtoient la voûte céleste de l'hémisphère boréal, ses points cardinaux et ses signes astrologiques, emprisonnés sous une étonnante cloche. Façon piège de cristal. Une seconde peau fabriquée sur les bords de la Meurthe, à Baccarat, au coeur de la Lorraine, par des artisans verriers dont 25 sont Meilleurs Ouvriers de France. C'est d'ailleurs le nombre le plus élevé de cette élite d'artisans au sein de toutes les maisons de luxe françaises. Depuis 1764 (date à laquelle Louis XV autorisa Louis de Montmorency-­Laval à établir une verrerie dans le village), on taille, on grave et on souffle ici des trésors de délicatesse et de raffinement pour la marque Baccarat, et pour des figures majeures du design : Arik Levy, Andrée Putman, Philippe Starck, Jaime Hayon, etc. Cette année, quelques-uns des 600 ouvriers de la manufacture ont ainsi minutieusement fabriqué le généreux cabinet de cristal (9 kg tout de même) commandé, au micron près, par l'horloger suisse. « Avec enthousiasme et passion » précise-t-on en choeur, puisque la maison aime par-dessus tout les défis. Question d'amour propre, on dit bien que les Lorrains sont têtus... Après trois semaines de travail (et de multiples taillages, découpages au disque de diamant, sciages, forages, polissages, etc.), direction la vallée de Joux, en Suisse, pour le montage final chez Jaeger-­LeCoultre. Au bord du lac de Joux, « la grande maison » finalise ici la fameuse horloge. Dans le cristal monobloc, on encapsule à la main les 309 pièces du mouvement de l'Atmos. Un travail rigoureux et chirurgical, réalisé dans les quelque 25.000 m2 de bâtiments flamblant neufs (entièrement d'un blanc clinique) dédiés à la recherche et aux différentes opérations de fabrication. Deux philosophies de travail totalement différentes, mais dévouées, passionnément, à la conception d'un objet rare et poétique, nécessitant près de cinq mois de travail au total. D'où un prix (comptez 89.000 euros pour la pendule teintée bleue) légitimement élevé. Une pépite.
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