L'Amérique cherche à préserver un allié dans le monde arabe

« Salam alaykoum ! » Si le président Obama, avant son discours du Caire, le 4 juin 2009, tenait à marquer un nouveau départ dans les relations américano-arabes en saluant les Égyptiens dans leur langue, il a eu du mal à réagir habilement face à la révolte de ce même peuple. De fait, comme l'analyse Anouar Boukhars, professeur au McDaniel College, « les États-Unis ont complètement sous-estimé la soif de changement des Égyptiens et assistent aujourd'hui, impuissants, à une crise qui risque de redistribuer les cartes géopolitiques du Moyen-Orient. Et pas forcément à leur avantage... ». Au-delà des bévues des Bush, père et fils, en Irak, c'est surtout le fiasco de Jimmy Carter en Iran qui est présent dans les esprits à Washington. L'ancien président démocrate avait retiré son soutien au shah, laissant la voie libre aux ayatollahs militant pour une théocratie foncièrement anti-américaine toujours en place aujourd'hui. Il n'est donc pas - ou plus - question, pour Barack Obama, de se faire l'avocat d'un « regime change » brutal. L'Égypte, qui a conclu un traité de paix avec Israël en 1978, sous l'égide du même Jimmy Carter, est un allié fidèle, récompensé à coups de milliards de dollars d'aide militaire. Du coup, après avoir, au nom de la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes, demandé le départ de Moubarak « maintenant », la Maison-Blanche a assoupli sa position. De peur que, comme n'a d'ailleurs cessé de le laisser entendre Moubarak lui-même, l'après-Moubarak ne tourne au chaos et que des forces peu amènes envers les intérêts américains prennent le pouvoir.Pour se retrouver « du bon côté de l'Histoire », il s'agit désormais, pour Obama, de faire en sorte que la transition s'opère de façon ordonnée. Et pour cela, il faut non pas que le président seul soit mis à l'écart, mais que la structure du pouvoir sur laquelle s'est appuyé le raïs pendant trente ans soit démantelée. Aussi, non seulement Moubarak a quitté la tête de son parti, mais l'ensemble de ses membres dirigeants ont démissionné ce week-end, y compris son fils Gamal, qui ne peut ainsi plus prétendre à la succession paternelle. Enfin, un comité de réformes constitutionnelles devrait être prochainement mis sur pied.Mais si c'est l'avènement d'une démocratie qui se joue, c'est aussi l'avenir de la relation entre les États-Unis et l'Égypte, voire entre le monde arabe et l'Amérique. « Si l'Égypte avance vers la démocratie, l'administration Obama restera dans les esprits comme ayant, éventuellement, accompagné ce changement. En revanche, si le pays replongeait dans le chaos et l'autocratie, alors ce serait la fin du ?renouveau? que Barack Obama a appelé de ses voeux lors de son discours historique du Caire », relève Shadi Hamid, directeur de recherche à la Brookings Institution. Un tel enjeu vaut bien quelques jours de patience... Lysiane J. Baudu et Sixtine Léon- Dufour, à New York.
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