« Le marché et la BCE vont pousser

STRONG>Jacques Cailloux,chef économiste Europe chez Royal Bank of Scotland Que pensez-vous de la stratégie anticrise de la BCE ?La BCE a été très critiquée même avant la crise pour son manque de réactivité. Mais sans son action, la situation serait bien pire aujourd'hui. Elle a agi de façon très importante, bien qu'elle doive agir dans un environnement qui n'est pas le sien. Si on critique la BCE, il faut aussi et surtout critiquer les autorités fiscales pour leur absence de coordination et leur communication déficiente. Jean-Claude Trichet l'a lui-même souligné la semaine dernière devant le Parlement européen en réclamant un message commun de la part des autorités fiscales. Elles n'ont en effet pas de porte-parole crédible. Est-ce le marché qui ne comprend pas ?Nous avons affaire à un dialogue de sourd entre les autorités et le marché. Il y a une absence de reconnaissance de la gravité de la situation de la part des autorités. Le FMI connaît les risques de contagion pour avoir dû faire face aux crises des pays émergents. Les autorités européennes non. Il faut pourtant anticiper le mécanisme de contagion et y répondre par une communication très claire et des actions à la fois claires et fortes. Et agir de façon préventive. Leur discours reste pour l'instant trop axé sur les fondamentaux. Les investisseurs, eux, sont dans un mécanisme d'auto-protection, en anticipations des pertes supplémentaires qu'ils peuvent encourir. Le tout dans un marché qui a perdu à la fois liquidité et conviction. Et c'est cela qu'il faut contrer.N'y-t-il donc que la BCE pour conjurer la crise ?La BCE reste la seule institution en place à pouvoir venir au secours des marchés obligataires. Elle est la seule à pouvoir intervenir à tout moment et elle a une capacité d'intervention illimitée. Son programme de rachat d'obligations souveraines avait perdu de la crédibilité jusqu'à la semaine dernière. Les choses se mettent en place mais il faudrait qu'elle en fasse davantage, et notamment qu'elle agisse sur la dette espagnole, dont elle ne s'est jusqu'à présent pas portée acquéreur. Il faudrait qu'elle augmente son programme d'achat de 100 milliards d'euros supplémentaires d'ici au début de l'année prochaine. Les mécanismes en terme de contagion sont puissants, via des comportements de marché auto-réalisateurs qui se détachent des fondamentaux. Il faut donc une réponse puissante. Annoncer un montant serait toutefois contreproductif ; il lui faut montrer qu'elle est prête à défendre le système quel qu'en soit le coût. Faites-vous confiance à la BCE pour réussir?Ce n'est pas une question de confiance : il n'y a pas le choix. La BCE a gagné un énorme pouvoir de négociation sur le futur de la zone euro et elle doit l'utiliser. Elle peut mettre des conditions sur la table lorsqu'elle procède à des achats. Elle va imposer l'évolution des institutions pour solidifier le système. Trichet appelle déjà à une quasi-intégration fiscale de la zone euro. Et avec le marché, il va pousser à faire l'Europe politique. Propos recueillis par Isabelle Croizard et Christèle Frad
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