La France... ce paradis fiscal

Menaces de nationalisation, spectre d\'un taux d\'imposition à 75% sur les plus fortunés, coûts salariaux élevés, code du travail rigide... Rien n\'y fait ! Puisque la France est le troisième pays au monde (après la Chine et les Etats-Unis) à attirer les capitaux étrangers. C\'est cette capacité de l\'économie française à avoir pu attirer quelque 43 milliards d\'euros sur les neuf premiers mois de l\'année 2012 que le New York Times qualifiait tout récemment de « paradoxe ».Une mine d\'or pour les grandes entreprisesEtrangement, la réalité crue du quotidien de ses classes moyennes et pauvres n\'altère pas ce diagnostic selon lequel la France constitue une mine d\'or pour des entreprises qui y bénéficient de crédits d\'impôts et d\'allègements fiscaux parfois substantiels sur des dépenses affectées à différents postes. Contexte idéal qui motive en effet l\'installation sur l\'Hexagone de grands noms comme Google, ou Amazon (qui y établit un second centre de distribution). A l\'exemple de ces 171 compagnies ou usines qui ont opté en 2011 pour la France, préférée de très loin à l\'Allemagne et à la Grande Bretagne. Sachant que le gouvernement français actuel persévère dans cette voie avec des mesures emblématiques comme les allègements de 20 milliards d\'euros de charges, ou encore le « Crédit Impôt Recherche » donnant droit à un remboursement de 45% des dépenses de l\'entreprise sur le poste de la recherche et du développement.Car, en dépit de l\'austérité mise en place par tous ses gouvernements successifs depuis le déclenchement de la crise, malgré un contexte social tendu et un écheveau de lois et de règlementations complexes - à moins que ce ne soit grâce à cette complexité ? -, la France est bel et bien un paradis fiscal pour les multinationales et pour les moyennes à grosses entreprises. Elles peuvent en effet s\'y établir et y prospérer quasiment sans payer d\'impôts sur leurs bénéfices, en « triturant » ses lois à la limite de la légalité, souvent au-delà... Forçant la réaction, parfois brutale et souvent légitime, des autorités françaises.Les multinationales profitent de la multilocalisationAutorités françaises qui ont perquisitionné le groupe Partouche, propriétaire de casinos, d\'hôtels, de restaurants et de sociétés de paris en ligne. Qui ont déboulé dans les bureaux de Microsoft (en juin 2012) et de Google (en juin 2011), accusés d\'avoir fait facturer à leurs succursales irlandaises des tâches accomplies par les branches établies sur territoire hexagonal. Autorités françaises qui ont également « visité » les locaux de Facebook (été 2012), pour revenir en novembre de la même année perquisitionner quatre centres de Google. Et y saisir des dossiers dans une affaire où cette entreprise est accusée de ne pas déclarer nationalement des transactions de ventes d\'encarts publicitaires effectuées auprès de consommateurs français. Google qui se défend naturellement en arguant que ses recettes françaises ne proviennent que de tâches subalternes, même s\'il reste inconcevable et injustifiable qu\'elle ne paie que 5 millions d\'euros d\'impôts (en 2011) sur le 1,25 milliard d\'euros de profits générés en France ! Idem pour eBay et pour sa société affiliée PayPal qui furent encerclées et fouillées de manière spectaculaire en décembre dernier. Accusées de n\'avoir réglé que 1,35 millions d\'euros d\'impôts sur les 22 millions engrangés en France...Certes, les multinationales excellent dans l\'art de payer le moins possible d\'impôts sur leurs bénéfices, comme dans celui de contourner subtilement les règlementations fiscales. Les exemples de GE et de Boeing qui, en dépit de leurs profits colossaux, ne s\'acquittent aux USA de nul impôt sur les bénéfices sont bien connus. Pour autant, ces géants ont parfait leurs méthodes et affiné leur stratégie en France. Par l\'usage de succursales en Irlande ou aux Pays-Bas qui reçoivent le gros des recettes pendant que la société enregistrée en France n\'est rémunérée que pour couvrir ses frais. Ce qui permet de transférer par la suite les profits vers des centres offshores. Autant de tours de passe-passe qui se situent dans cette zone grise que le système judiciaire français, très lent, peine à élucider et à démêler.A l\'heure de la rigueur qui touche le citoyen français et alors que cette anée 2013 risque fort d\'être celle de la contraction économique pour la France, espérons que notre « hospitalité industrielle » ne nous transforme pas en « idiots du village global ».*Michel Santi est un économiste franco-suisse qui conseille des banques centrales de pays émergents. Il est membre du World Economic Forum, de l\'IFRI et est membre fondateur de l\'O.N.G. « Finance Watch ». Il est aussi l\'auteur de l\'ouvrage \"Splendeurs et misères du libéralisme\"
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