Yves Rocher s'est-il fait piéger par Poutine ?

« Yves Rocher plante trois millions d’arbres en Russie… et [coffre] les deux frères Navalny ? » titrait mercredi le journal d’opposition Novaïa Gazeta, publiant au passage les dix pages de la plainte déposée par le groupe breton. Signée par Bruno Leproux, le directeur général d’Yves Rocher Vostok (branche russe du groupe), cette plainte datée du 4 décembre 2012 vise Alexeï Navalny, charismatique leader de l’opposition libérale russe, et son frère cadet. Ils sont accusés du « crime » d’avoir « obligé » Yves Rocher à surpayer un service de transport durant quatre années. L’accusation d’apparence anodine intervient dans un contexte de harcèlement policier et judiciaire mené pour discréditer Alexeï Navalny.Des militants de l’opposition russe ont immédiatement réagi mercredi soir en lançant une campagne sur Facebook appelant les internautes du monde entier à boycotter les produits d’Yves Rocher, qui se trouve désormais accusé de « participer aux poursuites politiques » engagées par le Kremlin. Novaïa Gazeta suggère que le puissant Comité d’Enquête de Russie, directement placé sous l’autorité de Vladimir Poutine, a « demandé » à la direction d’Yves Rocher Vostok de porter plainte. « Et la société n’a pas trouvé la force de résister », ironise le journal. Le service de presse d’Yves Rocher est resté injoignable hier.Le deuxième marché du groupe après la FranceHomme d’affaires installé en Russie depuis quinze ans, Bruno Leproux ne peut ignorer ni la situation politique, ni les règles régissant les rapports entre affaires et pouvoir. En dénonçant l’opposant le plus populaire du pays au chef du Comité d’Enquête, qui appartient au premier cercle de Vladimir Poutine, il a placé Yves Rocher dans un engrenage aux conséquences imprévisibles. La Russie est le deuxième marché du groupe après la France en terme de chiffre d’affaires Le Kremlin cherche des poux dans la tête des opposants gênants par des moyens directs (contrôles fiscaux) mais aussi de plus en plus souvent par des moyens détournés, en faisant pression sur des plaignants tiers pour qu’ils engagent des litiges commerciaux avec les sociétés des opposants. Les autorités vont parfois jusqu’à menacer de retirer aux opposants la garde de leurs enfants « pour mauvais traitements ».Vinci a déjà connu des déboires similaires Face à la répression et à l’inflexibilité du Kremlin, l’opposition russe vise occasionnellement ce qu’elle suppose être des alliés du pouvoir russe. La société Vinci en a déjà fait les frais, cible d’attaques très médiatiques d’écologistes russes opposés à la construction d’une autoroute à travers un bois dans le Nord de Moscou. Vinci construit l’autoroute avec la bénédiction de Vladimir Poutine au sein d’une coentreprise avec un homme d’affaires réputé proche du président. Vladimir Poutine a promis en décembre dernier de faire remonter la Russie de la 120ème à la 20ème place du classement « Doing business » de la Banque Mondiale, distinguant les pays en terme de climat d’investissement. Pas sûr qu\'impliquer les investisseurs étrangers dans le bourbier politique russe soit la meilleure façon d\'y aprvenir. 
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