Quand les marques font du neuf avec du vieux

En janvier dernier, le temps d'un spot publicitaire, les téléspectateurs avertis ont cru vivre un retour vers le passé. Pour vanter les qualités de sa fameuse barre, Mars France remettait à l'écran « le Monastère », un film publicitaire vieux de quinze ans. Fallait-il voir dans cette reprise une conséquence de la crise ou la volonté de surfer sur une tendance forte du marketing, le phénomène vintage ? Les deux, probablement, à en croire Thierry Gaillard, PDG de Mars Chocolat France : « En novembre dernier, avec mes équipes marketing, et après avoir constaté que l'époque était au vintage, nous avons pris la décision de relancer ce film, qui, lors de ses premières diffusions, avait enregistré des scores exceptionnels dans les tests publicitaires. » Le film, et sa bande-son très rock, a, semble-t-il, suffisamment marqué les esprits pour que, quinze ans plus tard, il connaisse les scores obtenus lors de son lancement.Pour la marque, ce recyclage publicitaire est tout bénéfice. Primo, elle économise les frais de production, réinvestis dans l'achat d'espaces ; secundo, le clin d'oeil aux jeunes adultes, les enfants et les adolescents d'hier, lui attire un courant de sympathie sur lequel elle entend capitaliser. 70 % des achats de la marque sont en effet effectués par les mères de famille. En leur offrant une petite dose de « revival », la marque espère bien les convaincre que ce qui a été bon pour elles le reste encore pour leurs enfants. Une partie du succès de Nutella ne repose-t-il pas sur la nostalgie « papillesque » des mères de famille ? Époque bénieDe son côté, Jean-François Sacco, vice-président en charge de la création de CLM BBDO, l'actuelle agence de Mars, explique : « L'histoire et son exécution sont remarquables, c'est probablement ce qui explique que le film fonctionne toujours. Par ailleurs, dans une période où les perspectives sur l'avenir sont plutôt sombres, la marque joue sur l'optimisme, la liberté. » Bref, le spot renvoie à une époque bénie où tout était permis, ou presque.« Le vintage se ressource toujours lorsqu'il y a une accélération vers la modernité. L'instinct de survie conduit les individus et les marques à se replonger dans le pass頻, analyse Jean-Luc Bravi, coprésident de l'agence DDB. Et de constater que ce phénomène interroge les agences : « Voir ressortir une copie vieille de quinze ans ou d'anciennes icônes, c'est en quelque sorte un aveu de faiblesse qui n'est jamais très agréable. » Ce serait donc un aveu de faiblesse pour les agences qui ne parviennent plus à imposer ce que Nicolas Bordas, le patron de TBWA, appelle « l'idée qui tue », mais aussi pour les annonceurs, qui se réfugient dans le politiquement correct par crainte de susciter des retours de bâton. La polémique autour de la récente campagne antitabac en a apporté une nouvelle preuve. « L'internationalisation des marques a policé toutes les prises de parole. En jouant la fibre vintage, les marques et la publicité se souviennent qu'elles ont autrefois exprimé le désir de rébellion », avance Jean-François Sacco. Un désir qui aujourd'hui ne serait plus dans l'air du temps. Pas si sûr... Rita Mazzol
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