Les députés européens mettent la PAC nouvelle sur les rails

C'est une petite révolution qui va s'accomplir aujourd'hui à Strasbourg. En votant ce jeudi matin le rapport du libéral écossais George Lyon, les députés vont littéralement préempter la prochaine réforme de la Politique Agricole Commune, attendue en 2013. La PAC, la plus ancienne politique commune, et la plus dispendieuse aussi (elle coûtera 56 milliards d'euros aux Européens en 2010), a été pendant 60 ans l'enfant exclusif de la Commission et des États. Traité de Lisbonne oblige, le bébé passe un peu sous la tutelle parlementaire. « Le Parlement est véritablement le premier à fixer les grandes orientations. La Commission et le Conseil devront prendre position sur cette base. C'est une première », explique Michel Dantin, en charge du sujet dans le groupe du Parti populaire européen.Or cette « base » marque un tournant à 90° par rapport aux quinze dernières années. Depuis l'intégration des produits agricoles dans le vaste mouvement de libéralisation des échanges au début des années 1990, l'optique de la Commission européenne était celle d'une intégration maximale au marché mondial. Au fil des réformes, notamment celle de 2003, les moyens de la PAC ont été transférés - d'abord du soutien aux exportations au soutien à la production, puis, du soutien à la production au soutien au revenu des agriculteurs, découplé de la production. On en était là quand la crise a frappé. La réforme de 2013, qu'esquisse le rapport Lyon, marquera la fin de ce cycle entamé il y a vingt ans.C'est un « retour aux fondamentaux », assure Michel Dantin. « Il fallait rappeler que la première des priorités de la PAC, c'est l'alimentation des Européens et, accessoirement, des nations solvables », indique-t-il. « Ensuite seulement, vient la contribution du secteur aux grands causes écologiques » - à commencer par le changement climatique. Nouveau consensus Le vote de ce jeudi matin laisse penser qu'un consensus nouveau est en train de se dégager, en dépit des sensibilités notoirement différentes, par exemple des Scandinaves ou des Néerlandais, traditionnellement plus libéraux, et des Français, sur ces sujets. C'est que deux crises sont passées par là. La flambée des prix en 2007 et 2008 a remis au goût du jour, sinon un certain productivisme, au moins le besoin de sécurité alimentaire. Celle de 2009, où les revenus des agriculteurs européens ont chuté de façon vertigineuse (? 20% en France), plaide pour des amortisseurs plus puissants face aux aléas du marché. Des notions comme la « gestion de l'offre », les « mécanismes d'assurance », ou les « fonds de garantie », qui n'appartenaient pas au vocabulaire de l'ancienne Commission Barroso, refont surface.Personne ne veut revenir à la forteresse européenne, aux montants compensatoires et aux tonnes de beurre subventionné honteusement exportés en Russie soviétique. Les Européens vont devoir augmenter considérablement leur productivité pour résister à la concurrence mondiale. L'élargissement à l'Europe centrale a augmenté la surface agricole utile de 40 %, mais ce potentiel reste largement sous-exploité faute d'investissements. Les prochains réformateurs de la PAC n'auront pas trop de deux ans pour remettre de l'ordre dans la gestion de manne agricole...
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