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Alioune Diop, Léopold Sédar Senghor et Amadou Cissé Dia à l'ouverture officielle au 1er Festival mondial des arts nègres, Dakar, 1966.« Présence africaine », l'affirmation d'une identitéEn novembre 1947, alors qu'il vient de recevoir le prix Nobel de littérature, André Gide signe l'avant-propos d'une toute nouvelle revue parisienne, « Présence africaine ». Dans ce texte, il parle du « peuple noir » et de l'attitude de l'Europe à son égard. L'« exploitation » tout d'abord, la « condescendante piti頻 ensuite, la « compréhension » enfin. Gide poursuit : « On découvrit soudain qu'il aurait, lui aussi, quelque chose à nous dire, mais que, pour qu'il nous parle, il importe d'abord de consentir à l'écouter. »Texte fort s'il en est, qui donne le ton de la revue et de l'ambition qui l'anime : réunir des intellectuels pour prendre la parole et se faire entendre face au colonialisme. Engager un combat dont les armes seraient politiques, littéraires et culturelles.D'autres noms prestigieux apparaissent dans ce premier numéro : Aimé Césaire, Albert Camus, Georges Balandier, Léopold Sédar Senghor ou encore Jean-Paul Sartre et Emmanuel Mounier ? qui ont eux aussi créé leur revue, respectivement « les Temps modernes » (1945) et « Esprit » (1932). Dans l'effervescence intellectuelle qui suit la Libération, tous se réunissent grâce aux efforts d'un homme, le fondateur de « Présence africaine », l'intellectuel sénégalais Alioune Diop, qui annonce d'emblée que la revue ne se placerait « sous l'obédience d'aucune idéologie philosophique ou politique ».Dès le début, la forme s'impose : des essais et études africanistes, complétés par des extraits et des critiques d'?uvres littéraires et poétiques africaines. Mais « Présence africaine » n'est pas qu'une revue. C'est aussi une maison d'édition, créée très rapidement, en 1949. C'est surtout un réseau extrêmement actif. Alioune Diop organise des colloques, invite Sartre à tenir des conférences pour les étudiants africains résidant à Paris, s'investit financièrement dans la production d'un documentaire signé Alain Resnais qui attaque radicalement le colonialisme.L'action du réseau « Présence africaine » prendra toute son ampleur dans une série de trois événements majeurs qu'il organise entre 1956 et 1966. Les « congrès internationaux des écrivains et artistes noirs » tout d'abord. Le premier se déroule à la Sorbonne. On y parle racisme, colonisation. On évalue les responsabilités de la culture occidentale. Les discussions sont houleuses mais permettent à ces intellectuels venus du monde entier d'enfin se rencontrer et de définir ensemble un inventaire des cultures noires.Le second congrès, à Rome en 1959, est plus politique et cherche des mesures pour accompagner les futurs pays indépendants d'Afrique. Enfin, en 1966, le « 1er festival mondial des arts nègres » a lieu à Dakar et à Paris. Événement sans précédent, il se révélera pour les Africains, selon les mots de l'écrivain malien Amadou Hampathé Bâ, « un moment crucial pour dire ce que nous avons depuis toujours à dire, et qui n'a jamais pu franchir le seuil de nos lèvres ».
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