Berlin agit contraint et forcé

La solution à la crise grecque viendra de Berlin. Pour les marchés, la zone euro, c'est en effet d'abord l'Allemagne. Avec un PIB qui représente 27 % du total des Seize et une réputation de stabilité financière à toute épreuve, la République fédérale a conservé son statut de référence qu'elle avait avant la création de la monnaie unique. Pour rassurer les investisseurs, il faut donc que Berlin agisse. Mais le gouvernement d'Angela Merkel préfère jouer le splendide isolement, estimant qu'aider Athènes serait un mauvais signal envoyé aux marchés, qui y verraient une incitation à ne plus respecter le pacte de stabilité et de croissance. Pas question donc de payer pour les erreurs du « Sud ». Mercredi, la position officielle n'avait pas bougé d'un iota : les Grecs sont seuls responsables de leurs finances publiques.En réalité, ce discours traduit surtout l'irritation des Allemands, furieux d'être contraint de jouer le rôle de prêteur de dernier ressort pour le « Club Med » de la zone euro malgré les garde-fous du traité de Maastricht. Les Allemands traînent donc les pieds. À Berlin, on ne cesse d'ailleurs de répéter que rien ne presse. « Il n'existe pas de doute sur la capacité de la Grèce à rembourser ses dettes et ce pays n'a aucun besoin de financement actuellement », déclare-t-on dans les cercles gouvernementaux. Mais ces propos signifient aussi que la pression des événements fera intervenir l'Allemagne. Ces derniers jours, plusieurs signes sont venus confirmer que Berlin ne restera pas passif. Mardi, le ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a assuré que « l'Allemagne était au côté de la Grèce afin que les marchés financiers aient à nouveau confiance en elle ». Et le « Financial Times Deutschland » assurait que le gouvernement préparait un plan de sauvetage sur lequel le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, aurait informé ce mercredi les dirigeants de son parti, la CDU.En fait, l'europhile Angela Merkel ne peut se permettre de laisser Athènes faire défaut sans bouger. C'est l'ensemble de la construction européenne qui serait subitement remise en question et la responsabilité politique de l'Allemagne serait engagée. « Vous pouvez dire à un ami qu'il doit apprendre à nager parce que, s'il se noie, vous ne l'aiderez pas. Mais s'il se noie vraiment, il faudra bien que vous veniez à son aide », résume l'économiste Jürgen Matthes, de l'institut IW de Cologne. Sans compter que la contagion pourrait menacer la stabilité financière de l'Europe et celle de l'euro. Or, l'Allemagne est attachée à la stabilité de l'euro, comme elle l'était à celle du mark. La crainte de l'inflation reste fortement ancrée outre-Rhin et c'est bien la chute récente de l'euro qui semble avoir contraint Berlin à se montrer plus ouvert. Reste à évaluer les conséquences : l'Allemagne pourrait être tentée de prendre plus d'influence dans la zone euro à l'avenir. La nomination du président de la Bundesbank, Axel Weber, à la tête de la BCE l'an prochain pourrait en être le premier signe visible. Romaric Godin, à Francfort
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