Paris hésite à vendre son surplus de quotas CO2

Vendre ou ne pas vendre les réserves de CO2 français ? Entre Bercy et le ministère de l'Écologie, un débat s'est ouvert. Selon nos informations, des contacts ont déjà été noués avec deux acheteurs potentiels, la Norvège et l'Espagne. Ces deux pays émettent plus de CO2 que leur objectif pour la période 2008-2012. Ils doivent donc acheter la différence. Mais le sujet est délicat.Le ministre de l'Environnement polonais y a déjà perdu son poste, après avoir bradé des quotas juste avant la conférence de Copenhague, en novembre. Les échanges s'étaient accélérés à l'approche du sommet, de peur qu'un échec total des négociations ne réduise à néant la valeur de cette monnaie carbone. Malgré le maigre résultat de la rencontre, les quotas Kyoto présentent encore une valeur minimale, entre 7 et 10 euros par tonne de CO2. Un niveau qui n'est toutefois pas pérenne. La Russie, qui disposerait de 6 milliards de quotas à vendre selon Barclays Capital, est en train de se mettre en ordre de bataille pour en monétiser une partie : Sberbank devrait mettre 100 millions de tonnes de quotas sur le marché durant le premier trimestre de cette année. Appelés « air chaud » par les spécialistes du climat, ces quotas russes n'ont pas très bonne presse car leur légitimité environnementale est sujette à caution : les faibles émissions de CO2 de la Russie s'expliquent exclusivement par l'effondrement de l'économie soviétique après 1990 (date de référence pour le calcul des émissions).Les quotas français semblent en revanche plus vertueux : ils s'inscrivent dans l'engagement d'une réduction de CO2 de 20 % entre 1990 et 2020. Au total, le surplus français était de 40 millions de tonnes à fin 2007. Depuis, la cagnotte s'est gonflée, puisque les émissions 2008 et 2009 devraient être singulièrement inférieures au plafond annuel, fixé à 563,9 millions de tonnes de CO2 pour la France pour la période 2008-2012. Même s'il convient de conserver quelques réserves en cas de progression des émissions d'ici à 2012, le gouvernement pourrait facilement vendre plusieurs dizaines de millions de tonnes de quotas. le point de vue de bercyPour le ministère de l'Écologie, cette cession permettrait de montrer que la vertu environnementale a du bon. Les faibles émissions de la France sur la période Kyoto pourraient ainsi financer le principal engagement signé à Copenhague : une dotation de 150 millions d'euros pour la lutte contre la déforestation, dans le cadre du programme « Fast Track Funding » : le financement doit être assuré avant 2012.Mais Bercy ne voit pas les choses du même oeil. Alors qu'une nouvelle version édulcorée de la taxe carbone est toujours dans les tuyaux, la cession par le gouvernement de quelques millions de tonnes de CO2 à 10 euros risque aussi de brouiller le message ? déjà complexe ? de la taxe carbone. Celle-ci prévoit en effet de taxer les utilisateurs de combustibles sur la base d'un prix du carbone de 17 euros la tonne, et non pas 10 euros. Le ministère des Finances tend également à s'opposer à l'affectation des ressources sous-tendue par ce schéma, contraire à un principe de base de la fiscalité. n
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