Mode

Belle idée. Loïc Prigent n'en est pas à sa première tentative d'inviter le grand public à pénétrer au sein des seins des maisons de mode, grâce à sa caméra. Après Chanel et Louis Vuitton, il a réussi à convaincre quatre marques ? Jean Paul Gaultier, Fendi, Proenza Schouler et Sonia Rykiel ? de lui ouvrir grand les portes de leurs studios à J-1 d'un défilé. Moments exceptionnels ? À la veille de la présentation à la presse du fruit de la réflexion et du processus créatif d'un designer, la pression atteint son paroxysme. Pour bien comprendre, il ne faut jamais oublier que la mode est une industrie qui, deux fois par an, expose son savoir-faire à la vindicte des journalistes de mode et des acheteurs. Une collection ne plaît pas ? Un jeune créateur ne s'en remet pas, une maison bien établie perd des millions. L'enjeu est considérable. Et tout se joue en dix, quinze minutes. Le « show must go on ». Il est sans rappel.enjeux différentsL'intelligence des quatre reportages de Loïc Prigent est d'avoir choisi quatre maisons différentes avec des enjeux particuliers. Chez Jean Paul Gaultier, au 325, rue Saint-Martin, dans l'immeuble de sept étages, où tous les métiers qui constituent le fleuron de l'artisanat d'art sont intégrés (de la broderie, aux boutons en passant par la dentelle), vingt-quatre heures avant le show, c'est l'exigence intransigeante du créateur qui donne le tempo. La robe clown est à rebroder, une autre, malgré les cent quatre-vingts heures de cousu main qu'elle a nécessité, n'est pas à la hauteur? Les petites mains se relaient jour et nuit pour mettre en ?uvre la part de rêve qu'est la haute couture.Entre Rome et Milan, l'ambiance chez Fendi est différente. Silvia Fendi, la directrice artistique, celle qui a inventé le sac baguette en 1997, reste en retrait pour laisser Karl Lagerfeld conduire, comme il le fait depuis 1965, la collection de prêt-à-porter. Ici, les plus belles fourrures sont rasées à la main et ajustées jusqu'au dernier moment. Anna, la première d'atelier, voue une admiration sans borne au créateur. Elle lui a juré fidélité « ad vitam eternam ». Anna Wintour, la rédactrice en chef du « Vogue » américain, passe déjà les fourrures en revue « backstage » quand Karl Lagerfeld arrive en retard.Chez Sonia Rykiel, Loïc Prigent a eu le privilège de filmer la veille du quarantième anniversaire de la marque. Nathalie Rykiel veut conserver la surprise qu'elle a concoctée pour sa « maman ». Dans le plus grand secret, les créateurs, d'Armani à Ralph Lauren, en passant par Jean Paul Gaultier et Martin Margiela, ont imaginé une tenue pour incarner la femme Rykiel. Sonia, en maîtresse hiératique, évolue comme sur un nuage, ne se doutant de rien, au-dessus de toute cette agitation. Digne des précieuses ridicules? Difficile d'y échapper. La mode, c'est aussi cela. Un mix de légèreté et d'enjeux financiers. Une entreprise créative passionnante.
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