La finance peine à prendre le risque climatique en compte

Une fois n'est pas coutume, l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), traditionnellement plus présente sur le recyclage des déchets ou les économies d'énergie dans l'habitat, tend la main aux acteurs de la finance hexagonale. Elle propose aux banquiers, analystes financiers et assureurs de travailler ensemble pour élaborer des méthodes d'intégration des enjeux du changement climatique à l'analyse financière. Car aujourd'hui, si la perception des enjeux climatiques s'avère assez claire dans cette population, elle n'est pas suivie d'une véritable prise en compte de ces enjeux dans la valorisation des entreprises. C'est ce qui ressort de l'étude commandée par l'Ademe au cabinet OTC Conseil et rendue publique mercredi.« Les investissements d'aujour­d'hui déterminent les émissions de gaz à effet de serre de demain », a rappelé le chef du service économie et perspective de l'Ademe, Frank Jésus, justifiant l'intérêt porté par l'agence au secteur financier. Or, si 88 % des acteurs interrogés estiment que, dans une vision de long terme, les risques et opportunités liés au changement climatique doivent contribuer au choix des entreprises composant leur portefeuille, ils ne sont plus que 63 % à penser qu'ils sont d'ores et déjà pris en compte dans la valorisation des entreprises, et 24 % à avoir eux-mêmes mis en place une méthode pour les intégrer à leur analyse.Si l'obsession du court terme explique en partie la difficulté des acteurs financiers à prendre en compte des risques et opportunités liés à des phénomènes de long terme comme le changement climatique, elle n'est pas seule en cause. Quand bien même ils le voudraient, les analystes financiers manquent d'outils pour intégrer le changement climatique à leur réflexion. D'abord au niveau des données. Même celles concernant les émissions de gaz à effet de serre (dont le reporting se généralise rapidement) restent assez peu nombreuses. Y manquent surtout un historique solide et une méthode de reporting standard. « Même les entreprises qui les mesurent peuvent changer régulièrement de méthode », souligne le responsable de la recherche ISR chez Crédit Agricolegricole Cheuvreux, Stéphane Voisin. Sans parler de la fiabilité de ces données, dont 95 % ne sont pas vérifiées. Ou du manque de visibilité concernant l'évolution réglementaire.Dès lors, « quel critère choisir pour composer un portefeuille ? » s'interroge le directeur général délégué en charge du développement chez Natixis Asset Management, Philippe Zouati, qui a privilégié une approche qualitative pour son fonds climat lancé il y a deux ans. Dans le même esprit, la Macif a décidé de se pencher sur les stratégies de recherche et développement des entreprises en matière de changement climatique.Les uns comme les autres soulignent l'importance du dialogue avec les entreprises et la nécessité de rechercher l'information à la source. Autre conclusion de l'étude, la prépondérance dans les analyses des facteurs de risque réglementaires sur les risques physiques. De quoi donner l'idée à l'Ademe de suggérer au gouvernement quelques aménagements en matière de réglementation environnementale, voire financière...
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